Regard médical : questions à David Tougeron, hépato-gastro-entérologue

David Tougeron

Vous êtes spécialiste en oncologie digestive. Quel est votre parcours ? J’ai effectué mes études de médecine à Paris à la faculté de Necker, avant d’intégrer le service d’hépatogastro-entérologie du […]

Vous êtes spécialiste en oncologie digestive. Quel est votre parcours ?
J’ai effectué mes études de médecine à Paris à la faculté de Necker, avant d’intégrer le service d’hépatogastro-entérologie du CHU de Rouen pendant sept ans, d’abord en tant qu’interne, puis comme chef de clinique-assistant. J’ai toujours voulu m’orienter vers la cancérologie, j’ai décidé de me spécialiser en oncologie digestive, car c’est un domaine dans lequel l’activité de recherche est très riche. En effet, les cancers digestifs sont les cancers les plus fréquents en France et de nombreux progrès thérapeutiques ont été réalisés ces dernières années.

Partagée entre l’hôpital et l’université, en quoi consiste aujourd’hui votre activité ?
Je suis arrivé au CHU de Poitiers en 2009 en tant que chef de clinique assistant en hépato-gastro-entérologie. Depuis 2011, je suis praticien hospitalier et maître de conférences à la faculté de Poitiers, dont je suis par ailleurs membre du conseil scientifique.

Mon activité au CHU est à cheval entre les services d’oncologie médicale et d’hépato-gastro-entérologie. Rattaché à ce dernier, j’effectue plutôt une partie diagnostic des tumeurs digestives (bilan préthérapeutique et décision thérapeutique) et je participe à la nouvelle consultation d’oncogénétique digestive. En oncologie, j’effectue le suivi en consultation des patients traités par chimiothérapie pour un cancer digestif. Cette position transversale me permet d’assurer une continuité des soins des patients tout au long de leur maladie. Avec le Dr Aurélie Ferru, nous coordonnons les décisions thérapeutiques multidisciplinaires des patients atteints de cancers digestifs fréquents mais aussi des formes rares, telles que les tumeurs endocrines. Cela représente entre 300 et 400 nouveaux patients par an, dont certains habitent à plus de 100 km. Nous avons un rôle de référent et de recours pour la région.

Je participe également à l’enseignement à la faculté, à la formation des étudiants en médecine et à l’encadrement des internes, notamment pour leur thèse de médecine.

Vous avez récemment reçu le prix Jean et Madeleine Schaeverbeke pour vos travaux sur le cancer du colon. Pouvez-vous nous en dire plus sur vos axes de recherche ?
Parallèlement à mon activité médicale, j’ai une activité de recherche clinique importante. Ainsi, je coordonne plus d’une quinzaine d’études sur de nouveaux traitements des cancers digestifs. Cela permet à tous les patients de la région d’en bénéficier : nouvelles chimiothérapies, chimiothérapie hyperthermique intra-péritonéale (CHIP), thérapies ciblées, radioembolisation… Une partie de ces traitements sont développés en collaboration avec les services de radiologie et de chirurgie digestive.

Du côté de la recherche fondamentale, dans le cadre de ma thèse de sciences, j’ai travaillé sur la réponse immunitaire antitumorale dans une équipe Inserm lorsque j’étais à Rouen. Actuellement, je travaille avec le laboratoire LITEC (inflammation, tissus épithéliaux et cytokines), dirigé par le Pr Jean-Claude Lecron, sur les mécanismes physiopathologiques des toxicités cutanées des traitements anticancéreux. Je travaille également avec le laboratoire de cancérologie biologique, dirigé par le Pr Lucie Karayan-Tapon, sur le développement de la médecine personnalisée. En effet, nous avons de plus en plus de traitements efficaces et un enjeu majeur est de choisir le traitement le plus efficace pour le patient, en prenant en compte les spécificités moléculaires et biologiques de sa tumeur. Je suis également parti un an dans un prestigieux laboratoire de recherche aux États-Unis afin de développer cette thématique de la médecine personnalisée en oncologie. Cette expérience personnelle et professionnelle a été enrichissante pour développer la recherche translationnelle au sein de notre CHU.

Au niveau national, je suis membre du conseil scientifique de la fédération francophone de cancérologie digestive (FFCD), qui coordonne la recherche clinique en oncologie digestive en France. Je m’intéresse par ailleurs à une forme particulière de cancer du colon qui présente une instabilité génétique. À ce titre, j’ai coordonné une cohorte nationale de plus de 500 patients, avec des résultats importants concernant la chimiosensibilité de ces tumeurs, qui ont été présentés cette année en congrès aux États-Unis.