Ouverte en 2011 au sein du CHU de Poitiers, l’unité de soins et d’accueil des sourds a continué à assurer ses missions pendant la crise sanitaire même si la fréquentation en présentiel a fortement chuté, relayée par la téléconsultation. « Avant la crise, nous avions déjà parlé de télémédecine mais je pense que l’épidémie a été un formidable accélérateur de sa mise en œuvre et de son ancrage dans nos pratiques. Les échanges avec nos patients ne pouvant qu’être visuels, la visioconférence était l’outil idéal. Tout comme nous, les patients ont apprécié les consultations sous cette forme. Et même si elle ne remplace pas les consultations en présentiel, nous allons continuer à utiliser les téléconsultations » explique le docteur Jérôme Laubreton, responsable de l’unité. Les consultations urgentes dans certains services ayant été maintenues, le service s’est chargé de l’organisation du parcours de soins des patients sourds pour d’autres pathologies que la covid-19. Aucun patient sourd n’a dû être hospitalisé à cause du virus.
Au début de la crise sanitaire, les documents d’information autour du virus n’étaient, pour la plupart, pas adaptés aux personnes sourdes. Celles-ci sont allées chercher les informations là où elles pouvaient les trouver c’est-à-dire sur internet et les réseaux sociaux, où malheureusement il s’y est dit tout et n’importe quoi. L’unité s’est fortement mobilisée pour informer, éduquer et prévenir sur la covid-19. Le Dr Laubreton et Marie-France Debeaulieu, l’intermédiatrice, ont développé des supports visuels qui expliquent la covid-19, le confinement, les gestes barrières, etc. D’autres supports vidéos ont ensuite été produits en partenariat avec les autres unités de France mais également avec la société française de santé en langue des signes, créée tout récemment. Cette période, très anxiogène pour la population générale, a été bien plus difficile encore pour les personnes sourdes. « Plusieurs de nos patients ont souffert de problèmes psychologiques. Déjà isolés du fait de leur handicap, ils se sont sentis en grande souffrance, enfermés dans un climat anxiogène aggravé par les informations erronées des réseaux sociaux. Nous avons fait un énorme travail de réassurance et lorsque cela était nécessaire, nous les avons adressés au centre médico-psychologique signes du Centre hospitalier Henri-Laborit, prenant en charge la santé mentale des patients sourds » souligne le Dr Laubreton.
Si les consultations ont repris presque normalement, elles sont rendues compliquées par le port du masque. « La langue des signes ne repose pas que sur les mouvements des mains. Elle s’appuie également sur l’expression du visage, de la bouche. Avec le masque, cela change beaucoup les choses. Nous n’avons plus que les yeux et les mains » précise le Dr Laubreton qui cherche parmi les masques inclusifs, le modèle le plus sûr et le plus adapté.
Unité d’accueil et de soins des sourds Ouverte en 2011 au sein du CHU de Poitiers, l’unité de soins et d’accueil des sourds a pour mission d’offrir aux sourds des soins de qualité équivalente à ceux de la population générale, en levant les obstacles de communication dont ils sont victimes. Prévue initialement pour ne fonctionner que deux jours par semaine, elle accueille ses patients 5 jours par semaine depuis 2016. Les demandes de plus en plus importantes et l’activité croissante ont imposé son ouverture à temps plein. En 2019, 1 200 consultations ont été effectuées et la file active annuelle de patients est de près de 350. Sous la responsabilité du docteur Jérôme Laubreton, le service est composé d’une secrétaire bilingue, Emilie Boujut, d’une intermédiatrice de communication, Marie-France Debeaulieu et de deux interprètes Léa Beaunay et Elisabeth Le Duigou. La secrétaire organise les rendez-vous, reçoit le public sourd et coordonne la présence des interprètes dans les services. L’intermédiatrice, qui est une personne sourde, « permet d’établir un pont culturel entre le monde des sourds et le monde des entendants. Le public sourd a vraiment une culture particulière. Elle est donc là pour s’assurer que les patients comprennent tant sur le fond que sur la forme, les messages délivrés par les soignants » précise le Dr Laubreton. Les deux interprètes sont présentes à mi-temps. |