Aider les jeunes à arrêter de fumer grâce à la musique

Arrêt tabac CHU Poitiers

La musique adoucit les mœurs, mais aide-t-elle également à arrêter de fumer ? C’est la question à laquelle le CHU de Poitiers veut répondre avec une nouvelle étude, baptisée MuSTOPSmok, menée au centre d’investigation clinique CIC 1402 par le Dr Claire Lafay-Chebassier, pharmacien pharmacologue au sein du service de pharmacologie clinique et vigilances du CHU de Poitiers et pharmacien délégué du CIC 1402.

Cibler les jeunes

Alors que l’étude CESTO 2, qui consistait en un essai clinique d’un nouveau traitement pour aider au sevrage tabagique sous forme d’injections, arrive à son terme, le CHU de Poitiers démarre une nouvelle étude, toujours dans le thème de l’arrêt du tabac, sous l’impulsion du Dr Claire Lafay-Chebassier, en partenariat avec l’Université de Poitiers.

Cette étude s’adresse pour le moment exclusivement aux 18-25 ans et consiste à mesurer l’impact de séances musicales sur la gestion du craving, cette envie irrépressible de fumer qui subsiste bien après les symptômes physiques liés au sevrage tabagique. Ces séances sont proposées en complément d’un traitement médicamenteux classique et devraient permettre aux participants de mieux gérer leur stress. « En discutant avec les fumeurs, on nous dit souvent que l’un des freins au sevrage, c’est la peur de ne pas réussir à gérer son stress, surtout sur les jeunes populations », explique le Dr Claire Lafay-Chebassier. « Cela a été relevé également par une étude menée aux Etats-Unis ».

Près d’un tiers des jeunes fume aujourd’hui. Il y a donc un réel enjeu de santé publique sur cette population. De plus, les traitements classiques ont une efficacité modeste sur cette tranche d’âge. « On est face à des personnes qui ont peu d’années de consommation, à qui l’on propose le même parcours de sevrage que pour des personnes qui fument depuis des années », explique le Dr Claire Lafay-Chebassier. En effet, il n’existe à ce jour que peu de programmes spécifiques pour ces jeunes fumeurs.

L’étude, financée par le GIRCI SOHO dans le cadre de l’appel à projet ReSP-IR, a inclus ses premiers patients avant l’été. « La population que nous visons n’est pas facile à recruter », explique le Dr Claire Lafay-Chebassier. « La plupart des jeunes fumeurs ne sont pas du tout dans une dynamique de sevrage, ils se disent qu’ils verront cela plus tard ». Or, sensibiliser les jeunes au sevrage tabagique dès leurs premières années de consommation, c’est prévenir des années de consommation à venir.

Et en pratique

Dans le parcours de sevrage tabagique, on constate un fort taux de rechute dans les six mois à un an après l’arrêt, lié notamment au craving. De l’anglais « to crave » qui signifie « mourir d’envie ». Ce terme désigne des envies irrépressibles de fumer qui se caractérisent par des pics de 3 à 5 minutes pendant lesquels l’envie de fumer est particulièrement forte. C’est pour agir et lutter contre ces facteurs de rechute que les interventions musicales interviennent. Elles ont lieu au centre d’investigation clinique CIC1402 du CHU de Poitiers et sont animées par Carole David, infirmière et technicienne de recherche clinique. Pendant vingt minutes, une musique choisie parmi des musiques aux styles variés amène à la relaxation, grâce à sa séquence « en U », en plus des effets déjà bien connus de la musique en général sur le cerveau. Cette séquence particulière présente un rythme et un volume sonore qui varient en intensité, ce qui a un impact direct sur les participants. Ceux-ci bénéficient de deux séances par semaine le premier mois, puis d’une séance par semaine le deuxième mois, et enfin d’une séance tous les quinze jours le troisième et dernier mois de l’étude.

Les participants sont revus en consultation chaque mois pendant la durée de l’étude afin de mesurer l’évolution de leur craving et anxiété, et d’identifier les symptômes de sevrage qu’ils pourraient rencontrer, en comparaison avec des patients qui ne bénéficient quant à eux pas des interventions musicales.

Accompagner aussi les professionnels de santé

Une seconde étude, baptisée MuSmokHEALTH, vise quant à elle les professionnels de santé fumeurs, et rejoint l’objectif de MuSTOPSmok de mesurer l’impact de la musique sur l’arrêt du tabac. Les professionnels de santé constituent l’un des rouages majeurs dans la lutte anti-tabac, mais la prévalence tabagique est particulièrement élevée dans cette population : entre 16 et 43 % selon les professions. Il est d’autant plus important que ces professionnels arrêtent de fumer que leur statut tabagique influe sur la prise en charge des patients fumeurs qu’ils rencontrent et sur la manière dont ils dispensent les traitements de sevrage tabagique.

L’étude MuSmokHEALTH, financée par l’appel à projet de médecine translationnelle de l’Agence régionale de santé Nouvelle-Aquitaine, débutera au début de l’année 2024. Cette étude sera également l’occasion de réaliser des analyses du microbiote intestinal des participants avant et après le sevrage tabagique, au moyen de prélèvement de selles. En effet, le Dr Lafay-Chebassier porte également le projet de recherche MISETARE, qui consistera à comparer le microbiote intestinal des participants. Tout d’abord, la comparaison sera effectuée entre fumeurs et non-fumeurs, pour déterminer s’il existe un lien entre le microbiote et le tabagisme, mais également si le microbiote peut être un élément prédictif du succès d’un sevrage tabagique et du risque de rechute. Pour cela, le microbiote des fumeurs avant et après sevrage sera comparé, afin d’observer la modification de celui-ci. Cela permettrait notamment de mettre au point de nouvelles aides à l’arrêt du tabac. Ce projet est soutenu par le fonds Aliénor du CHU de Poitiers.

Envie de participer ?

MuSTOPSmok :
Pour participer, il faut être étudiant entre 18 et 25 ans, fumer plus de 5 cigarettes par jour et être motivé pour arrêter. Contactez le 05 16 60 42 41 ou le 05 49 44 46 89, de 9h à 17h, ou envoyez un mail à carole.david@chu-poitiers.fr

MuSmokHEALTH :
Pour participer, il faut être un professionnel de santé âgé de plus de 18 ans. Contactez le 05 16 60 42 41 ou le 05 49 44 46 89, de 9h à 17h, ou envoyez un mail à carole.david@chu-poitiers.fr