Après un cancer du sein, seulement 20 % des femmes demandent une reconstruction mammaire. Chimiothérapie, radiothérapie, opération… Les patientes sont déjà passées par de nombreuses d’épreuves et, même si la perception de leur image est altérée, accepter de subir une nouvelle opération chirurgicale n’est pas une démarche facile.
Une fois cette décision prise, plusieurs techniques de reconstruction s’offrent à elles, il y a deux grandes catégories de reconstructions : celles nécessitant une prothèse et celles sans prothèse. La première solution peut s’accompagner d’une asymétrie avec l’autre sein, celui-ci ayant tendance à se modifier dans le temps, alors que la prothèse est de volume et forme fixes. A l’inverse, les techniques sans prothèse, autrement appelé autologues, permettent de reconstruire le sein avec uniquement les tissus de la patiente, ce qui permet d’obtenir un sein reconstruit ayant une souplesse et une forme très proches de l’autre sein (controlatéral) avec une évolution symétrique dans le temps.
Les patientes doivent être mises au courant de tous les procédés utilisables, y compris les plus novateurs. « Le médecin échange avec sa patiente à propos de son mode de vie, de ses antécédents, de ses traitements et de ses attentes, puis il analyse sa morphologie et lui propose une prise en charge sur mesure. Il lui explique ce qu’il est possible de réaliser, expose les limites, les avantages et les inconvénients de chaque technique, mais il laisse le choix à la patiente. Nous n’imposons pas un type de reconstruction », détaille le Dr Vincent Huguier, chirurgien plasticien au CHU de Poitiers.
De plus en plus de patientes optent pour une reconstruction naturelle sans prothèse. Une des techniques autologues proposées par le Dr Huguier se nomme la DIEP (Deep inferior epigastric perforator flap), qui permet une reconstruction très naturelle. Seul le CHU de Poitiers la propose dans le Poitou-Charentes et ce depuis 2010.
Un résultat pérenne
« Cette technique fait appel à la microchirurgie, précise le Dr Huguier. Elle consiste à prélever la peau, la graisse et les petits vaisseaux du bas ventre qui sont séparés du muscle, puis branchés sous microscope sur les vaisseaux du thorax. La graisse reconstruit le volume et la peau du ventre reconstruit celle du sein. La cicatrice résiduelle est en bas du ventre. Il est important de préciser que ce procédé permet de préserver les muscles du ventre, évitant les risques d’éventration et de douleurs lombaires. Comme la graisse du sein et du ventre sont proches, la consistance du sein reconstruit et de l’autre sein sont similaires. De plus, le résultat est pérenne, puisque les deux seins vont évoluer de la même façon dans le temps, la symétrie sera conservée avec les années, ce que ne permet pas toujours une reconstruction unilatérale par prothèse, et évite ainsi d’autres interventions de symétrisation à l’avenir. »
Deux interventions sont souvent nécessaires pour arriver à ce résultat. Une pour prélever et poser le lambeau, puis, quelques mois après, une pour parfaire la symétrie de la poitrine. L’aréole et le mamelon sont reconstruits en dernier, sous anesthésie locale. Le DIEP se pratique aussi bien en reconstruction primaire (en même temps que l’opération d’ablation du sein), qu’en reconstruction secondaire (à distance de la mastectomie). L’hospitalisation dure une semaine et le taux d’échec est de 5 % environ.
L’équipe de chirurgie plastique du CHU de Poitiers travaille en synergie avec ses collègues des services de gynécologie, d’oncologie et de radiothérapie, ainsi qu’avec les confrères libéraux et hospitaliers de la région. Le DIEP peut également être proposé aux patientes présentant une aplasie congénitale d’un sein.
Le Dr Huguier, qui s’est formé à cette technique dans différents services (au Luxembourg, à Paris et à Genève), estime que cette technique permet d’obtenir un taux important de satisfaction des patientes, avec une bonne restauration de leur image corporelle.