Dénutrition : l’alimentation artificielle

Alimentation artificielle dénutrition

Lorsque l’enrichissement alimentaire est insuffisant ou qu’une alimentation normale est impossible, les patients peuvent se voir administrer une solution nutritive artificielle. Margaux Nesme, et Pascale Hermouet, toutes les deux diététiciennes au CHU de Poitiers, en expliquent les grands principes.

Il existe deux modes d’administration pour la nutrition artificielle, la voie entérale et la voie parentérale. La nutrition par voie entérale est la méthode privilégiée si le tube digestif est fonctionnel parce qu’elle présente moins de risques infectieux. Elle est administrée soit par une sonde nasogastrique, nasoduodénale ou nasojéjunale, dans le tube digestif si elle est de courte durée ou bien par sonde de gastrotomie ou jéjunostomie, si elle est supérieure à un mois. La nutrition par voie parentérale, quant à elle, est administrée par voie intraveineuse centrale ou périphérique, les nutriments énergétiques (lipides, glucides et protéines) et non énergétiques mais essentiels (vitamines, minéraux et oligoéléments) étant transférés directement dans la circulation sanguine. Il existe une grande variété de produits de nutrition entérale et de nutrition parentérale ce qui permet de s’adapter aux besoins et capacités digestives de chaque patient. « La plupart du temps, les maladies chroniques induisent une perte d’appétit et/ou une augmentation de la dépense énergétique. Les patients se dénutrissent ou sont à risque de dénutrition. Nous mettons alors en place une alimentation parentérale si le tube digestif n’est pas fonctionnel ce qui arrive souvent en chirurgie viscérale. La nutrition parentérale, qui est vraiment la solution de dernier recours, ne se fait que sur prescription médicale », explique Margaux Nesme, diététicienne en chirurgie viscérale. En pédiatrie, la solution nutritive artificielle peut concerner toutes pathologies qu’elles soient aiguës avec une incapacité alimentaire sur un temps court ou chroniques comme c’est le cas des patients dans le service d’oncologie-hématologie pédiatrique. Pascale Hermouet, diététicienne en pédiatrie, prend en charge des enfants de 0 à 16 ans, parfois plus. « La spécificité du service de pédiatrie fait que je prends en charge des patients ayant des besoins nutritionnels très différents, adaptés à leur pathologie, à leur âge et à leur poids, avec des besoins allant de 400 kcal à plus 3 000 kcal. Les modes d’administration des nutritions entérales ou parentérales sont les mêmes que chez les adultes. Lorsqu’une nutrition entérale est mise en place pour une période supérieure à trois mois, nous proposons une gastrotomie c’est-à-dire la pose d’une sonde par un petit trou dans la paroi abdominale qui va jusqu’à l’estomac ». Quelle que soit l’alimentation artificielle choisie, le rôle des diététiciens est, dans un premier temps, d’évaluer l’état nutritionnel du patient, de calculer ses besoins énergétiques et de proposer le produit et le volume correspondants. Il s’agit ensuite d’en assurer le suivi puisque l’alimentation artificielle est mise en place progressivement. Elle peut être partielle ou totale, en fonction des apports alimentaires per os du patient, avec des volumes qui évoluent et elle peut être administrée à différents moments de la journée, en nocturne ou en diurne, en continu ou en bolus. Le suivi peut se poursuivre ensuite à domicile lorsque les patients rentrent chez eux. « Quand ils sont dans le service, c’est bien plus simple pour nous d’adapter le protocole à la tolérance, nous discutons avec l’équipe soignante, les médecins et la famille. A domicile, la situation peut évoluer c’est pourquoi nous restons en contact avec les patients, les soignants libéraux, les prestataires de service ou l’hospitalisation à domicile s’occupant du patient. Puis, lorsque nous les revoyons en consultation, les modifications de schéma de nutrition leur sont transmises assurant un suivi pour le patient ou les familles en pédiatrie afin que tout se passe au mieux. L’évaluation de l’état nutritionnel et des capacités alimentaires orales des patients nous conduisent à diminuer voire arrêter la nutrition artificielle lorsqu’elle n’est plus nécessaire ».