Entérocystoplastie robot-assistée : une première pour le service de pédiatrie du CHU de Poitiers

Entérocystoplastie

Le 14 novembre dernier, le docteur Marie Auger-Hunault, chirurgien pédiatre, et le docteur Simon Bernardeau, urologue, ont réalisé une entérocystoplastie chez une patiente âgée de 10 ans, de manière entièrement robot-assistée, une première pour le service de pédiatrie du CHU de Poitiers. Explication.

Qu’est-ce que l’entérocystoplastie ?

L’entérocystoplastie est une technique chirurgicale qui consiste à utiliser une partie du tube digestif afin d’agrandir ou de reconstruire la vessie. Cette technique est majoritairement pratiquée par les chirurgiens urologues, dans le traitement fonctionnel des vessies neurologiques ou dans un contexte de chirurgie carcinologique. Dans le cas qui nous intéresse ici, l’équipe a prélevé environ 10 cm d’intestin afin d’agrandir la vessie d’une jeune fille de 10 ans qui avait des troubles de la continence du fait d’une vessie de très petite capacité (70 ml). « Pour comparaison, une jeune fille de 10 ans a en moyenne une vessie de 300 ml », précise le docteur Auger-Hunault. L’avantage de prélever un bout d’intestin pour procéder à l’agrandissement de la vessie est que celui-ci va se modeler avec le temps. L’agrandissement réalisé pendant l’opération n’est donc pas définitif et la vessie pourra continuer à grandir en même temps que la jeune fille.

Les contraintes de la chirurgie robot-assistée en pédiatrie

Il faut savoir qu’au CHU de Poitiers, le service de pédiatrie n’a pas de plage opératoire robotique dédiée. Opérer un enfant avec le robot nécessite donc qu’un chirurgien disposant de plages opératoires en cède aux chirurgiens pédiatres. C’est ce que fait régulièrement le docteur Simon Bernardeau, urologue, spécialiste de la chirurgie robot-assistée, depuis environ deux ans, afin de proposer des opérations relevant de sa spécialité. Le docteur Marie Auger-Hunault est, pour le moment, la seule chirurgienne pédiatre à avoir opéré conjointement avec le docteur Bernardeau. Elle a fait une partie de son internat à Tours, où elle s’est formée à l’utilisation du robot puisque les CHU de Tours et de Limoges sont les premiers centres à avoir utilisé un robot chirurgical en pédiatrie. Régulièrement, le docteur Bernardeau et le docteur Auger-Hunault pratiquent donc des chirurgies robot assistées. « C’est un vrai bénéfice pour les jeunes patients puisque nous avons pu constater que ceux qui ont été opérés avec le robot restent en observation un jour de moins que les autres », indique le docteur Auger-Hunault. Cependant, pour pouvoir pratiquer ces opérations en chirurgie robotique, il est nécessaire que l’enfant soit assez « grand » pour pouvoir mettre en place le robot, bien que certains centres tendent à diminuer cette limite. En effet, à Poitiers, la limite adoptée pour pouvoir utiliser un robot sur un enfant est d’avoir, au minimum, 15 cm entre la xyphoïde (extrémité inférieure du sternum) et le pubis. Dans l’opération d’entérocystoplatie pratiquée récemment, c’est la première fois que les quatre bras du robot étaient utilisés sur un enfant, à Poitiers.

Entérocystoplastie par assistance robotique : une expertise rare

L’entérocystoplastie est une opération rare qui est majoritairement pratiquée, à l’heure actuelle, pour la pédiatrie, en chirurgie ouverte ou en coelioscopie. Le robot est très avantageux car contrairement à la chirurgie ouverte, il y a moins de risque d’occlusions sur brides. De plus, il y a aussi un avantage cosmétique avec la réduction de la taille des cicatrices. En chirurgie robot-assistée, il y a également un véritable gain puisqu’elle permet une vision peropératoire bien meilleure, et donc des sutures plus simples à réaliser, avec une rotation des bras de 360°.  La durée opératoire a été de 4h30. D’autres centres pratiquent cette chirurgie, dont la durée peut parfois aller jusqu’à 9h ou 9h30 de chirurgie. Ici, c’est une opération qui s’est vraiment faite à quatre mains entre le docteur Auger-Hunault et le docteur Bernardeau. « Si j’avais dû pratiquer l’opération seule j’aurais mis le double du temps » indique le docteur Auger-hunault. Le docteur Simon Bernardeau avait déjà l’expertise de la réalisation d’entérocystoplastie sur des adultes. « C’est ce qui fait la force d’un hôpital à taille humaine, la belle coopération entre les services, profiter du savoir-faire des uns et des autres pour améliorer la prise en charge des patients ! ». Il faut savoir que cette opération nécessite un grand nombre de sutures. Il y a donc un temps de surveillance post-opératoire important afin de surveiller notamment les risques de fuites au niveau des anastomoses digestives ou vésicales. La jeune fille est restée 10 jours en surveillance et elle présente à ce jour de très bonnes suites opératoires. Pour elle, c’est un véritable changement de vie puisque, même si c’est une jeune fille qui était habituée à l’auto-sondage, elle ne porte plus de couches et retrouve petit à petit une sérénité dans sa vie de tous les jours.

Forte de cette expérience réussie, le docteur Marie Auger-Hunault souhaite continuer de développer l’activité de la chirurgie pédiatrique robot-assistée. Elle espère notamment développer les opérations de chirurgie viscérale avec le concours du docteur David Soussi Berjonval et du professeur Jean-Pierre Faure.