Episode 7 – Autour de l’IRM 7 Tesla : Matthieu Lepetit-Coiffé et Julien Gervais, ingénieurs chez Siemens Healthineers

Matthieu Lepetit-Coiffe, responsable des partenariats scientifiques et cliniques et Julien Gervais, responsable de l’activité IRM, tous deux chez Siemens Healthineers, ont bien voulu répondre à nos questions.

Quelles sont vos fonctions au sein de la société Siemens Healthineers ?

Julien Gervais : Je suis responsable de l’activité IRM pour Siemens Healthineers en France.

Matthieu Lepetit-Coiffe : Je suis responsable des partenariats scientifiques et cliniques pour Siemens Healthineers et cela couvre l’ensemble des équipements de la société aussi bien sur la partie imagerie que la partie diagnostic de laboratoire.

Quels sont les liens de Siemens Healthineers avec le CHU de Poitiers ?

G. : Notre histoire avec le CHU date de quelques années déjà. Nous avons mené plusieurs projets ensemble. Au sein de Siemens Healthineers, nous connaissons tous le CHU de Poitiers.

L-C. : Les relations avec le CHU de Poitiers ont commencé avec la thèse CIFRE – Convention industrielle de formation par la recherche – de Mathieu Naudin financée par Siemens Healthineers. Il s’agissait d’un partenariat public-privé au sein duquel l’étudiant était à la fois salarié de l’entreprise et étudiant au sein du laboratoire de mathématiques et application LMA-DACTIM et de XLIM-ICONES laboratoire en traitements d’images. Les travaux de recherche sur l’imagerie par résonance magnétique menés dans le cadre de cette thèse portaient plus particulièrement sur la segmentation des tumeurs de types gliomes.

G. : Comme Mathieu vous l’a énoncé, notre histoire avec le CHU date de quelques années déjà et nous avons mené plusieurs projets ensemble. En conséquence, au sein de Siemens Healthineers, tous nos collaborateurs connaissent l’importance du CHU de Poitiers pour notre société.

Quel est votre rôle dans la création du laboratoire commun I3M ?

L-C. : J’ai été impliqué dans le projet dès le début notamment avec la thèse de Mathieu Naudin ; cette première thèse nous a conforté pour la création du laboratoire commun I3M. La direction du laboratoire est tournante. Le Pr. Guillevin en était le directeur en 2019. J’assumerai la direction cette année pour représenter Siemens Healthineers, et en 2021, ce sera le tour du Pr. Fernandez-Maloigne.

Je tiens à signaler que notre laboratoire commun a eu la confiance du CNRS, agence de recherche publique d’importance capitale en France. Notamment dans sa dimension de modélisation mathématique appliquée à l’imagerie médicale et à la prédiction potentielle des pathologies. Cela donne une aura toute particulière au laboratoire. Je pense que c’est un élément structurant de notre partenariat.

Comment est né le projet de l’IRM 7 Tesla à usage clinique à Poitiers ?

G. : Il s’agit d’un ensemble de facteurs. Lorsque nous avons introduit sur le marché l’IRM 7 Tesla, nos partenaires du CHU de Poitiers se sont montrés intéressés par une utilisation clinique de l’équipement. Les réflexions sur la façon de construire le projet sont venues par la suite. La taille du CHU de Poitiers et la proximité des différentes équipes impliquées ont permis une mise en place rapide du projet.

Nous sommes très fiers de travailler avec le CHU de Poitiers et les équipes du Pr. Guillevin sur cet équipement. Il s’agit d’un partenariat d’exception et nous pensons que nous sommes dans d’excellentes conditions à Poitiers pour montrer la mise en œuvre et la plus-value clinique de cet équipement.

L-C. : Je tiens à souligner que le projet est né également grâce à un environnement humain qui s’est établi sur la durée d’abord avec l’expérience de la thèse et qui se prolonge actuellement dans le cadre du laboratoire commun. Les équipes de recherche et le CHU de Poitiers ont toute notre confiance pour mener à bien les projets ; c’est pourquoi Siemens Healthineers s’est engagé dans ce projet à plus long terme. Ce qui nous a également convaincu de travailler avec le CHU de Poitiers, c’est l’approche du Pr. Guillevin sur l’utilisation de la spectroscopie pour prédire le stade de développement de type gliome. Il s’agit d’une approche vraiment originale que seule l’équipe du Pr. Guillevin a mené jusqu’à présent en France.

Quels bénéfices allez-vous retirer de la collaboration autour de l’IRM 7 Tesla ?

L-C. : Le but de notre collaboration établie autour de l’IRM 7 Tesla et à travers le laboratoire commun I3M concerne le développement de l’intelligence artificielle et plus spécifiquement l’amélioration de l’imagerie multi-noyaux et multi-organes. L’utilisation la plus commune des IRM est l’imagerie. Mais l’équipement permet également de travailler sur un volet qui s’appelle la spectroscopie par résonance magnétique. Pour cela, nous avons besoin de séquences particulières qui peuvent utiliser à la fois le proton de l’eau ou d’autres noyaux de types phosphore, oxygène, sodium… Ces séquences et les résultats obtenus vont permettre de nous renseigner sur différents aspects ; davantage sur le métabolisme des cellules plutôt que sur un organe dans sa globalité. L’objectif est donc d’utiliser à la fois l’imagerie, la spectroscopie et sa résonance magnétique pour améliorer le diagnostic et aller vers de la médecine de précision.

G.: L’installation de l’IRM 7 Tesla au sein du CHU de Poitiers est également motivée par la preuve d’une utilisation clinique de l’équipement. L’IRM 7 Tesla était jusqu’à présent utilisé uniquement dans le cadre de la recherche et testé sur des volontaires, beaucoup plus rarement sur des patients. A Poitiers, l’IRM 7 T va pouvoir être utilisé en clinique. L’objectif est d’évaluer ce que cette technologie peut apporter aux patients et aux praticiens, de manière à ce que d’autres établissements puissent compter sur des équipements de haute précision.

Qu’est-ce que l’IRM 7 Tesla apporte au niveau clinique ?

G. : Le champ magnétique est 2,3 fois plus important que l’IRM 3 Tesla. Plus le champ magnétique est important, plus le rapport signal/bruit est important. Cela permet notamment d’augmenter la résolution spatiale, c’est-à-dire que l’on verra des choses plus fines, plus précisément. L’objectif de cet équipement est d’offrir plus de précision dans les maladies neuro-dégénératives comme la maladie d’Alzheimer, la sclérose en plaque ou l’épilepsie.

Prévoyez-vous déjà des améliorations sur l’IRM 7 Tesla ?

L-C. : En tant qu’industriel, nous avons montré la faisabilité clinique et l’intérêt du marquage clinique pour la neurologie et l’ostéo-articulaire. Ce qui compte pour nous maintenant, c’est de montrer l’application qui peut en être faite sur l’ensemble des organes. C’est fondamental pour développer un marché potentiel mais également pour augmenter les capacités de cet outil en vue d’améliorer la précision du diagnostic en général, pour les organes. Mais ce n’est pas encore pour demain puisque nous sommes encore dans une phase précoce de développement.

Avec quels autres CHU travaillez-vous ?

G. : Nous sommes présents sur la totalité des CHU en France avec l’un ou l’autre de nos équipements dans les domaines de l’imagerie diagnostique et interventionnelle, diagnostic de laboratoire, biologie moléculaire. Un IRM sur 2 dans les CHU et centres hospitaliers est fourni par Siemens Healthineers. Notre présence est particulièrement importante dans le secteur public avec une forte représentation des leaders d’opinions. Il est vrai que nous avons été précurseurs en termes d’innovation technologique avec les IRM 3 et 7 Tesla. Et les établissements publics ont une certaine inclination pour l’innovation.

Les partenariats sont un élément spécifique de notre stratégie de développement. Les équipements que nous produisons et vendons, sont issus directement de travaux de recherche communs avec nos partenaires. Des séquences sont testées chez ces derniers, validées ou non, ou en tout cas ajustées, afin que l’on puisse ensuite les déployer au niveau global. Nos travaux avec les CHU sont extrêmement importants parce que ceux-ci sont, en général, les premiers à s’équiper des technologies de pointe les plus avancées. Ils nous permettent d’ajuster des produits et de mettre au point de nouvelles technologies qui sont ensuite déclinées sur l’ensemble des équipements. Ces derniers sont ensuite proposés à l’ensemble des établissements de santé.