Insuffisance cardiaque : « mieux vaut prévenir que guérir »

Des maladies cardiovasculaires, on connait surtout les infarctus ou bien les accidents vasculaires cérébraux. L’insuffisance cardiaque est beaucoup moins connue et pourtant chaque année en France, elle provoque 70 000 décès et 150 000 hospitalisations. Alors que la journée mondiale du cœur s’est tenue le 29 septembre, le Dr Benoit Lequeux, cardiologue spécialisé dans l’insuffisance cardiaque, explique l’importance d’un dépistage précoce.

Qu’est-ce que l’insuffisance cardiaque ?

On parle d’insuffisance cardiaque lorsque la pompe cardiaque n’assure plus un débit sanguin suffisant pour répondre aux besoins en oxygène et nutriments de l’organisme.  Elle est généralement causée par des lésions cardiaques, parmi lesquelles, on retrouve le plus souvent des problèmes coronariens, les maladies de valves cardiaques et l’hypertension artérielle. Même si elle touche davantage les personnes âgées, les « cœurs vieillissants », l’insuffisance cardiaque peut toucher une population jeune, voire très jeune. Les quatre principaux symptômes de l’insuffisance cardiaque, malheureusement souvent confondus avec les signes normaux du vieillissement, sont réunis sous l’acronyme EPOF :

  • E pour Essoufflement
  • P pour Prise de poids
  • O pour Œdème des membres inférieurs
  • F pour Fatigue

Malgré des symptômes bien caractéristiques, la maladie est souvent diagnostiquée trop tardivement.

Importance de la prévention et du dépistage

Expert dans l’insuffisance cardiaque et l’hypertension artérielle, le Dr Lequeux insiste sur l’importance d’un dépistage précoce de la pathologie. Cela d’autant plus que sa fréquence a doublé en dix ans notamment avec le vieillissement de la population et une meilleure prise en charge des maladies cardiaques. « Les gens qui mourraient, il y a plus de 30 ans, parce qu’il n’y avait pas de stents ou de pontages coronariens, survivent à leurs problèmes coronariens. Pour certains patients, traités tardivement du problème coronarien, une partie de leur cœur ayant été endommagée, ils deviennent insuffisants cardiaques. De la même façon, les hypertensions non dépistées ou mal traitées », explique le Dr Lequeux. La méconnaissance par le grand public de l’insuffisance cardiaque pose d’énormes problèmes en termes de prévention et de dépistage précoce. Prise en charge suffisamment tôt, le patient voit son état stabilisé grâce aux nombreux traitements disponibles. « L’insuffisance cardiaque n’est pas une pathologie rare. On estime qu’actuellement il y a à peu près 1,5 millions de français qui en souffrent dont une bonne partie ignore les premiers symptômes EPOF. Ils ont les symptômes sans le savoir et ils finissent par être hospitalisés. La maladie est grave mais nous avons des traitements qui fonctionnent et si on les met en œuvre le plus tôt possible, nous sommes très efficaces », souligne le Dr Lequeux.

Prise en charge de l’insuffisance cardiaque au CHU de Poitiers

Le Dr Lequeux est responsable de l’unité de prévention cardiologique née en 2008 de la fusion du centre de prévention des maladies cardiovasculaires et du réseau d’aide à domicile de l’insuffisance cardiaque. Elle prend en charge les patients présentant une insuffisance cardiaque et les hypertensions artérielles sévères, l’unité étant accrédité « Blood Pressure Clinic ». Cette unité est composée d’un médecin, le Dr Lequeux, et de trois infirmières en rotation. Elle prend en charge les patients ayant été touchés par une maladie cardiovasculaire. La plupart sortent d’une hospitalisation, d’autres sont adressés pour des consultations spécialisées. Ils bénéficient d’un suivi personnalisé et adapté de façon à améliorer leur qualité de vie et leur pronostic vital, l’objectif étant d’éviter une nouvelle hospitalisation. Et les chiffres parlent d’eux-mêmes puisque sur la file active de 400 à 450 patients par an, très peu ont dû être réhospitalisés. Les patients se voient proposer de la télésurveillance de leur insuffisance cardiaque, sur une période de six mois renouvelable, au moyen d’équipements qui permettent de contrôler à distances différents paramètres (poids, tension artérielle, questionnaire EPOF). A la moindre alerte, l’unité est avertie et elle rentre en contact avec le patient pour contrôler et modifier les traitements, si nécessaire. Toujours par le biais de la télésurveillance, l’unité dispense des séances d’accompagnement thérapeutiques afin que le patient soit acteur dans la prise en charge de sa maladie, qu’il la comprenne parfaitement, qu’il reconnaisse les signes d’alertes.  L’unité travaille en étroite collaboration avec les spécialistes de ville et les médecins traitants en assurant des consultations d’optimisation des traitements pour des patients. « Nous ne faisons pas toute la prévention primaire des maladies cardiovasculaire destinée à diminuer l’apparition des risques puisque les patients que nous recevons ont déjà une pathologie cardiaque. Cette prévention primaire est parfaitement assurée par les médecins généralistes et les cardiologues de ville qui alertent leurs patients sur les effets d’une mauvaise hygiène de vie, de la sédentarité et du tabac. Nous prenons les patients en charge quand malheureusement les choses tournent mal et qu’ils deviennent insuffisants cardiaques. Nos actions se situent dans la prévention secondaire dont l’objectif est de diminuer la portée des risques », précise le Dr Lequeux. Et pour éviter le pire, les conseils du cardiologue sont simples : il faut prendre soin de soi dès le plus jeune âge ; avoir une bonne hygiène de vie et faire de l’activité physique afin de limiter les risques cardio-vasculaires qui peuvent eux-mêmes aboutir bien plus tard à une insuffisance cardiaque.

 

Pour en savoir plus

Replay du Facebook live du 17/09/2019 sur l’insuffisance cardiaque. Le Pr Luc Christiaens, responsable du centre cardio-vasculaire du CHU de Poitiers, et du Dr Benoit Lequeux, responsable de l’unité de prévention cardiologique, ont répondu aux questions des internautes.