Le 6 janvier, le CHU de Poitiers a lancé sa campagne de vaccination contre la covid-19, sur demande du ministère de la Santé et de l’Agence régionale de santé Nouvelle-Aquitaine (ARS). Pour revenir sur cette organisation chronométrée qui a rythmé et qui rythme encore ce début d’année 2021, Christophe Baltus, directeur du site de Poitiers et directeur adjoint de la direction qualité-pertinence-patients, revient sur les enjeux de cette campagne qu’il a coordonnée sur l’ensemble des sites de vaccination du CHU.
Une vaccination par phases
Le gouvernement a établi une stratégie vaccinale en plusieurs phases, en s’appuyant sur les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS). La priorité a été donnée dans un premier temps au public le plus fragile face à la covid-19, à savoir les résidents des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et les patients des unités de soins longue durée (USLD). A ce public se sont ajoutés également les professionnels de santé de ces secteurs, puis les professionnels de santé de plus de 50 ans ou présentant des pathologies à risque, à la fois pour les hospitaliers, mais également les libéraux. A la mi-janvier, la vaccination a été ouverte à une partie du grand public : les personnes âgées de plus de 75 ans et celles présentant des pathologies à risque selon une liste bien précise.
Le département de la Vienne compte aujourd’hui 8 centres de vaccination. Les 4 centres du CHU : Poitiers, Châtellerault, Montmorillon et Loudun, ainsi que la Polyclinique de Poitiers, la clinique de Châtellerault, un centre à Civray et un centre de l’Assurance maladie à St-Eloi, à Poitiers. Les directives nationales étant de proposer un centre pour 100 000 habitants, ce ratio est largement atteint dans notre département, ce qui s’explique par une volonté de proximité avec la population. « Le ministre de la Santé, à la demande du chef de l’Etat, a privilégié une réponse de proximité. Dans la mesure du possible, on met en place des centres adaptés, au plus près des personnes. », précise Christophe Baltus.
Au CHU de Poitiers, chaque directeur de site organise la campagne de vaccination, en coordination avec Christophe Baltus. Les directeurs de site animent une cellule de fonctionnement qui comprend au moins un médecin coordonnateur, un cadre de santé et un cadre référent médico-administratif (RMA) pour gérer les problèmes qui ont trait au fonctionnement du centre de vaccination, à une fréquence d’au moins une fois par semaine.
Au niveau du département, le rôle du CHU est double. Outre l’organisation et la gestion de la vaccination pour ses quatre sites, le CHU, par sa pharmacie centrale, fournit également des doses de vaccins aux autres centres.
La métamorphose du bâtiment administratif de Poitiers
Le premier centre de vaccination du site du CHU, à Poitiers, à destination des professionnels de santé, se situait au centre REB pédiatrique, tour Jean Bernard, sur le site de la Milétrie. Lors de la première phase de vaccination, les équipes sur le terrain ont fait remonter un certain nombre de difficultés : locaux disposés en longueur, trop exigus, et comportant plusieurs entrées, ce qui rendait la sécurisation des lieux et du parcours du patient difficile. D’autre part, maintenir en un lieu unique le dépistage pour les enfants et la vaccination n’était plus n’était plus tenable compte tenu de l’ouvrir de la campagne vaccinale à de nouveaux publics.
La direction générale a donc opté pour une nouvelle implantation. Plusieurs emplacements ont été envisagés, et c’est l’Agora, le bâtiment de direction sur le site de la Milétrie, qui s’est finalement imposé, avec une bonne accessibilité pour les personnes à mobilité réduite avec un cheminement aménagé, une aire de stationnement jouxtant le bâtiment, évitant ainsi un trop long déplacement pour les usagers, des zones spacieuses permettant l’aménagement de zones d’attente pour chacune des étapes de la vaccination, mais aussi pour les accompagnants, le tout dans le respect des gestes barrières. Un point d’attention particulier a été porté sur la gestion du flux des personnes, dans une logique de marche en avant, afin d’éviter les points d’engorgement tout au long du parcours : attente, stand administratif, rendez-vous médical, vaccination, puis temps de surveillance de 15 minutes.
Il a été nécessaire bien entendu d’aménager les lieux, le tout en une semaine, ce qui constitua un défi majeur. L’Agora n’étant pas un bâtiment qualifié pour ce type d’activité, il a fallu dans un premier temps obtenir une dérogation auprès des commissions de sécurité de la préfecture et de la mairie. D’autres adaptations ont été nécessaires car il s’agit d’un bâtiment administratif et non d’un bâtiment de soins : « on a par exemple de la moquette par terre, les murs ne sont pas nettoyables, les fenêtres n’assurent pas la confidentialité », souligne Christophe Baltus. Des exemples parmi d’autres pour démontrer à quel point le moindre détail a été passé au crible des professionnels médico-soignants, utilisateurs des lieux.
L’ensemble des points à traiter a été passé en revue lors d’une cellule de coordination réunissant les médecins et cadres responsables du fonctionnement du centre de vaccination, mais également les directeurs et cadres des directions concernées par l’aménagement du bâtiment : informatique, logistique, hygiène, gestion des risques, transports, sureté... Cette cellule a été chargée d’arrêter l’organisation, l’aménagement et l’adaptation des espaces au regard les protocoles sanitaires et des contraintes inhérents à l’accueil du public. « On a listé toutes les questions, et toutes les questions ont été traitées ». La signalétique extérieure du site a été adaptée afin de permettre aux usagers de localiser sans encombre le centre de vaccination, et il a fallu créer une signalétique intérieure pour le parcours de vaccination. Des circuits logistiques ont été définis l’approvisionnement du centre en produits pharmaceutiques et la gestion des déchets.
Enfin, notons qu’une plateforme téléphonique a été créée spécifiquement pour la prise de rendez-vous. « Il a été nécessaire d’installer les postes informatiques, de recruter des agents et de les former, le tout en une demi-journée, ce qui a constitué un vrai défi en termes d’organisation et de réactivité », indique Christophe Baltus. Au total, ce sont 10 agents contractuels qui sont mobilisés sur cette plateforme, afin de permettre aux usagers les moins à l’aise avec l’informatique de prendre rendez-vous pour se faire vacciner.
Le personnel médical s’est quant à lui mobilisé sur le centre de vaccination sous une forme totalement inédite de volontariat. Chaque professionnel, qu’il soit hospitalier, libéral, ou retraité, peut s’inscrire via une plateforme informatique pour une permanence médicale sur les différents centres de vaccinations. Les internes ont été intégrés à ce dispositif le 22 janvier.
Avec un créneau de vaccination toutes les 5 minutes, le flux de personnes fréquentant le centre est extrêmement important. Une bonne organisation du centre et la mobilisation de tous furent indispensable pour garantir le bon fonctionnement. « Dans une journée, sur environ 230 créneaux de vaccination, on n’a jamais eu plus de 40 minutes de retard, ce qui montre à quel point l’organisation est réactive », précise Christophe Baltus. Défi relevé pour toutes les équipes techniques, logistiques et administratives.
Les centres doivent désormais s’adapter au rythme d’approvisionnement en vaccins et à l’extension prochaine de la campagne vaccinale à d’autres publics.
Chiffres-clés 230 créneaux de vaccination par jour sur le site de Poitiers 1470 flacons délivrés par la pharmacie du CHU au 22/01. Plus de 6000 vaccinés au 28/01. |