Question à… Christophe Jayle, chirurgien cardio-thoracique

Pr Christope Jayle

Le professeur Christophe Jayle a fait ses études à Lyon avant de rejoindre le CHU Poitiers pour y effectuer son internat de chirurgie et un DEA en sciences chirurgicales à l’Inserm 1082, au coté du Pr Thierry Hauet. Il s’est ensuite spécialisé en chirurgie thoracique et cardio-vasculaire auprès du Pr Pierre Corbi. Il apprécie de travailler dans un établissement où il peut conjuguer recherche et activité clinique et dans un service où la volonté de participer à des études est forte. Depuis plusieurs mois, il tente de faire financer une étude sur le traitement des volets thoraciques via un projet de recherche médico-économique (PRME). Alors que nous sommes dans son bureau pour l’interviewer à ce sujet, le téléphone sonne : Cédric Carbonneil, chargée de mission de l’innovation à la Direction générale de l’offre de soins, lui annonce la nouvelle tant attendue : son projet est définitivement retenu !

En quoi consiste ce projet de recherche médico-économique ?
Ce projet constitue à étudier l’intérêt médico-économique d’une technique de traitement du volet thoracique (portion de la paroi thoracique complètement ou partiellement désolidarisée du reste de la cage thoracique à la suite d’une fracture multiple des côtes). Il permettra de déterminer l’impact global de la prise en charge des volets thoraciques en termes de santé publique, notamment en matière de durée et de coût pour l’hôpital et de qualité de vie et de douleur pour le patient. Si l’étude porte ses fruits, l’opération sera prise en charge par la Sécurité sociale, ce qui n’est pas le cas actuellement.

Comment les victimes de volet thoracique sont-elles prises en charge actuellement ?
Quand un patient arrive avec un volet thoracique, souvent provoqué par un accident de voiture ou de moto ou bien une chute de cheval ou d’un toit, il y a deux solutions : soit on laisse les fractures se remettre d’elles-mêmes, soit on opère. L’opération constitue à rapprocher les morceaux de côtes cassées grâce à des agrafes pour réduire les fractures. Il y a trente ans, une technique avec des agrafes en acier avait été testée, mais l’acier cassait et la méthode avait été abandonnée. Depuis cinq ans, nous utilisons des agrafes en titane, un matériau très résistant mais aussi très malléable, qui s’adapte à la morphologie incurvée des côtes.

Agrafe en titane
Agrafe en titane

Quels sont les avantages de l’opération ?
Pendant l’étude pilote, sur un petit nombre de patients, nous avons constaté que l’opération permettait de diminuer de trois jours le temps passé en réanimation et de réduire de dix jours la durée d’hospitalisation. De plus, les patients semblent moins souffrir, la fonction respiratoire est préservée et le gain esthétique est important. Nous avons donc sollicité la Direction générale de l’offre de soins pour obtenir le financement d’une étude de grande ampleur.

Comment va se dérouler cette étude ?
Elle durera deux ans à partir du 1er mai 2015 et devra intégrer 310 patients (155 opérés et 155 non opérés) pris en charge dans quinze CHU que nous allons choisir parmi les vingt-deux qui sont prêts à participer à l’étude. Le choix sera basé en partie sur le fait que l’équipe de chirurgie et celle d’anesthésie-réanimation soient soudées, comme c’est le cas au CHU entre notre service et celui du Pr Olivier Mimoz, qui soutient ce projet. Ce sera la première étude randomisée (les patients sont aléatoirement répartis) de cette ampleur dans le monde sur ce sujet. Le coût du projet est évalué à 7 600 euros par patient, soit 2 360 000 euros en tout. Il faut savoir que le coût des agrafes en titane est déjà compris entre 2 000 à 4 000 par patient. Actuellement, le coût de l’intervention des patients opérés pour un volet thoracique au CHU de Poitiers, soit une vingtaine par an, est pris en charge par le CHU via sa cellule innovation. Cela permet d’ailleurs à l’établissement d’être un précurseur de cette technique en France. Ensuite, il faut aussi payer le logiciel, le personnel, ainsi que les consultations et les examens spécifiques à l’étude.

Volet thoracique
Avant
Volet thoracique
Après