Tout récemment nommé professeur des universités, quel est votre parcours ? Je suis passionné d’anatomie et de chirurgie depuis tout jeune : j’avais 13 ans lorsque j’ai assisté à ma […]
Tout récemment nommé professeur des universités, quel est votre parcours ?
Je suis passionné d’anatomie et de chirurgie depuis tout jeune : j’avais 13 ans lorsque j’ai assisté à ma première opération au bloc de neurochirurgie à l’hôpital Necker, à l’occasion d’un stage au collège ! J’ai ensuite commencé mes études de médecine en 1994 à Paris, en parallèle desquelles j’ai suivi le cours de morphologie aux beaux-arts, car j’aime aussi beaucoup le dessin. Je suis arrivé en 2000 pour mon internat au CHU de Poitiers. J’y ai soutenu ma thèse de médecine en 2006 et de sciences en 2007. J’exerce depuis dans le service de neurochirurgie, aujourd’hui au sein de l’unité rachis-neurostimulation-handicap.
Vous vous êtes particulièrement distingué par vos interventions en neurostimulation. En quoi consiste le volet soignant de votre activité ?
Au CHU, nous réalisons une centaine de poses de neurostimulateurs par an dans des indications de douleurs réfractaires, ce qui reste inédit en France. Concrètement, cela consiste à implanter une électrode contre le système nerveux de patients souffrant de douleurs rebelles pour en atténuer l’intensité. Si la neurostimulation représente aujourd’hui plus de la moitié de mes interventions et consultations, elle entre pour moi dans une démarche plus globale de prise en charge du patient et représente un véritable travail d’équipe, en étroite collaboration avec nos collègues algologues, spécialistes de la douleur. A vrai dire, je ne suis qu’un « technicien » ponctuel dans le parcours douloureux d’un patient, là où mes collègues médecins sont ses partenaires de chaque instant. Tenter de soulager la douleur est une finalité, mais en amont du symptôme, il faut parfois et même souvent en traiter la cause « mécanique ». D’où mon autre spécialisation et activité transverse en chirurgie du rachis. Dans le prolongement de cette démarche, le troisième volet de mon activité de soins est dédié à la prise en charge du handicap. Après différentes formations diplômantes en pathologies neuro-musculaires, épileptologie, prise en charge de la douleur, chirurgie mini-invasive du rachis puis microchirurgie, je me suis dirigé puis formé à la robotique chirurgicale. Je suis persuadé que d’ici peu, le recours y sera quotidien en matière de chirurgie de « réparation fonctionnelle».
Vos travaux de recherche, également centrés sur le rachis, la neurostimulation et le handicap, sont amenés à s’intensifier. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Nos travaux tentent en effet d’entrer en totale cohésion avec cette activité de soins. En ce qui concerne le handicap, nous amorçons un partenariat de recherche avec des industriels qui développent les premières attelles électroniques d’aide à la motricité, avec nos collègues rééducateurs. En matière de biomécanique du rachis, notre axe de recherche porte sur la modélisation de fractures vertébrales et l’étude de matériels de stabilisation rachidienne. Pour ce qui est de la neurostimulation, « l’aventure poitevine » paraît incroyable. En 2011, notre projet ESTIMET portant sur la stimulation médullaire multidirectionnelle a reçu un financement de 1,9 millions d’euros par le ministère de la Santé, dans le cadre d’un programme de soutien aux techniques innovantes et coûteuses (STIC). Cela a permis la création du laboratoire de recherche N3LAB (Neuromodulation and Neural Networks LAB) et le recrutement d’une équipe de recherche formidable, qui travaille entre autres sur les difficultés d’évaluation de la douleur. Nous avons développé des outils informatiques tactiles afin de comparer les dispositifs de neurostimulation entre eux. Le N3LAB conduit par ailleurs une étude internationale, PROMISE, visant à comparer l’efficacité de la stimulation médullaire versus traitement médical optimisé sur 400 patients dans 32 centres (20 centres aux Etats-Unis et en Europe, dont un français).
Qu’en est-il de vos missions d’enseignement ?
J’ai commencé à enseigner à Poitiers il y a quinze ans grâce à la confiance et au soutien du Pr Pierre Kamina. J’ai essayé de vivre chaque cours comme le partage d’une passion. Devenir aujourd’hui professeur des universités peut être perçu comme un aboutissement, mais il s’agit plutôt d’un commencement, comme me le livrait un aîné, avec le sourire, il y a quelques années. Et la rentrée universitaire 2014 redémarre fort à la faculté ! Les moments marquants de ces deux prochains mois concerneront l’organisation d’ateliers internationaux de neurostimulation, dans le cadre d’une formation européenne accréditante et la participation à l’enseignement pour un nouveau master, dirigé par le Pr Jean-Pierre Richer, intitulé « analyse morphologique et méthodes d’évaluation de grandes fonctions chez l’homme ».