Vendredi 29 septembre est la journée mondiale du cœur. C’est l’occasion parfaite pour interroger le Pr Luc Christiaens sur le service de cardiologie qui, ces dernières années, a fortement développé ses techniques interventionnelles.
Qui êtes-vous ?
Je suis chef du service de cardiologie depuis 2018 et responsable du pôle cœur-
poumons-vasculaire depuis 2021. J’ai une formation de cardiologue généraliste avec pour surspécialités l’imagerie d’expertise en cardiologie (échographie, scanner cœur et IRM cœur) d’une part et la cardiologie interventionnelle d’autre part (coronarographies, angioplasties coronaires et TAVI : trans-catheter aortic valve implantation). Cela me permet d’avoir une vue générale de la cardiologie en restant à la fois clinicien, « imageur » et cardiologue interventionnel.
Quels sont les points forts du service de cardiologie du CHU de Poitiers ?
Nous en avons plusieurs. Dans les établissements hospitaliers importants, le service de cardiologie est habituellement divisé en plusieurs services, chacun traitant l’une des spécialités (coronaires, insuffisance cardiaque, valvulopathies, rythmologie). Notre avantage, qui est lié à la taille même du CHU de Poitiers, est d’avoir réuni dans un seul service toutes les spécialités de la cardiologie. Cela permet une communication beaucoup plus fluide entre les différentes surspécialités avec la préoccupation constante de conserver notre degré d’excellence pour chacune d’entre elles. C’est l’une de nos forces qui nous permet de placer le patient au centre des différentes pathologies et non pas de le faire « passer » d’un service à un autre. Un autre point fort de notre service est de mettre à la disposition des patients des urgences cardiologiques, ce qui leur évite de passer par les urgences générales. Cela permet de gagner du temps et le temps est important pour pouvoir sauver le muscle cardiaque. Il n’y a pas d’urgences cardiologiques dans tous les hôpitaux de France. C’est une particularité que nous devons absolument conserver. Pour terminer, nous avons développé, en collaboration avec l’équipe de radiologie, un secteur d’imagerie en coupe très performant, avec des vacations de scanner et IRM cœur réalisées par les cardiologues eux-mêmes, ce qui permet une synthèse plus rapide du dossier. Par exemple, je peux voir un patient en consultation puis le revoir en échographie cardiaque, puis en scanner, et enfin en coronarographie. Ce secteur s’intègre dans notre volonté d’offrir une prise en charge globale du patient au sein du service de cardiologie. Dans un souci d’efficacité, la cardiologie a toujours essayé de rester « maître d’œuvre » c’est-à-dire d’organiser et de réaliser les examens nécessaires à la compréhension et à la prise en charge des cardiopathies. Le service de cardiologie est très attractif grâce aux équipements performants notamment en imagerie ainsi qu’au développement de plusieurs techniques, soit de rythmologie, soit de cardiologie interventionnelle. Ceci permet de répondre à une demande de soins très techniques pour des patients adressés par La Rochelle, Niort, Angoulême ou Saintes, en coopération avec leurs praticiens.
Présentez-nous le service de cardiologie
Le service comprend deux ailes d’hospitalisation, l’hospitalisation de semaine et l’hospitalisation traditionnelle qui font chacune 28 lits. Il dispose également d’une unité de 16 lits de soins intensifs, d’un service d’admission d’urgences, un hôpital de jour, un service d’explorations non invasives où se font, par exemples toutes les consultations, les échographies mais aussi les tests d’effort. Notre secteur d’interventions invasives comporte actuellement deux salles de coronographie et angioplasties coronaires et deux salles pour la rythmologie interventionnelle (pose de stimulateur cardiaque, de défibrillateurs, exploration et traitement de troubles du rythme cardiaque). Enfin nous disposons d’une salle hybride que nous partageons avec la chirurgie vasculaire. Cette salle est vraiment un atout. Son caractère hybride repose sur deux aspects : la possibilité de transformation immédiate en salle de chirurgie traditionnelle (y compris avec pose d’assistance circulatoire) et l’aspect hybride de l’imagerie moderne. Elle peut être convertie rapidement de salle interventionnelle en salle de chirurgie en cas de complication grave. Cela reste exceptionnel mais ce n’est pas parce que cela est rare, que nous ne devons pas avoir la solution technique immédiate. Cela nous permet d’assurer le maximum de sécurité pour le patient. L’autre intérêt de la salle hybride est d’être une salle où l’on peut faire de la fusion d’image en temps réel sur le même écran pour guider la main de l’opérateur : le cardiologue guide son geste réalisé sous rayons X en fonction des images de scanner ou d’échographie per opératoire.
Et les professionnels du service ?
Nous sommes trois professeurs : le Pr Claire Bouleti qui s’intéresse plus particulièrement à l’insuffisance cardiaque, à l’imagerie en cardiologie et qui gère la recherche du service, le Pr Rodrigue Garcia, qui a pris ses fonctions au mois de septembre ce qui a permis de renforcer l’offre de soins en rythmologie, et moi-même. L’équipe compte également 14 praticiens et trois chefs de clinique pour répondre à la demande de soins cardiologiques du CHU et des sites de Châtellerault, Montmorillon et Loudun. Le service de cardiologie est très attractif grâce aux équipements performants notamment en imagerie ainsi que le développement de plusieurs techniques soit de rythmologie soit de cardiologie interventionnelle. Ceci permet de répondre à une demande soins très techniques pour des patients adressés par La Rochelle, Niort, Angoulême ou Saintes, régulièrement en coopération avec leurs praticiens.
Quelles sont ces nouvelles techniques de cardiologie interventionnelle ?
Il est essentiel que nos patients bénéficient de traitements efficaces en cardiologie interventionnelle. Il s’agit d’interventions soit sous anesthésie locale soit sous anesthésie générale qui réduisent les durées d’hospitalisation et qui ne nécessitent pas de réadaptation ultérieure. Les dossiers de ces patients sont bien sûr discutés au préalable avec nos collègues chirurgiens et anesthésistes réunis au sein d’une « Heart Team ». Au sein du service de cardiologie, nous avons développé plusieurs techniques. La première est le TAVI (Trans Catheter Aortic Valve Implantation) c’est-à-dire l’implantation d’une prothèse biologique fixée sur un stent dans la valve aortique par voie artérielle sous anesthésie locale et par voie artérielle fémorale pour la majorité des patients. C’est une invention française pour traiter les patients souffrant d’un rétrécissement serré de la valve aortique, souvent âgés de plus de 75 ans. Il s’agit d’une activité très importante au CHU de Poitiers puisque nous en avons réalisé 284 l’année dernière. Nous pratiquons également les fermetures de Foramen ovale perméable (FOP, défaut de la cloison entre les deux oreillettes pouvant être en cause dans des accidents vasculaires cérébraux), et les occlusions de l’auricule gauche avec mise en place d’une prothèse qui permet de réduire le risque d’accident vasculaire et d’embolie systémique d’origine cardiaque chez les patients ne pouvant recevoir d’anti-coagulant. Ces deux interventions se pratiquent en passant par une veine fémorale. Les réparations mitrales percutanés par pose de clip ou éventuellement par pose d’une prothèse effectuée avec le chirurgien cardiaque (première prothèse Tendyne réalisée au CHU de Poitiers au mois de mars 2023 avec le Dr Géraldine Allain, chirurgien cardiaque), se développent également. Dans un avenir proche, la pose de clip sur la valve tricuspide sera également proposée. Il est important de souligner que nous travaillons en étroite collaboration avec l’équipe de chirurgie et d’anesthésie cardiaque, chaque dossier étant discuté conjointement, au préalable, au sein de cette Heart Team. Lorsqu’une solution moins invasive et différente techniquement peut être proposée à un patient relevant de la chirurgie cardiaque, nous le prenons en charge en cardiologie interventionnelle. Ceci s’adresse en premier lieu aux patients à risque opératoire élevé (du fait de leur âge ou de leurs maladies associées). Toutes ces évolutions technologiques ne doivent pas faire oublier l’écoute du patient, le dépistage des souffles cardiaques par le simple stéthoscope, les progrès considérables du traitement médical et la lutte toujours nécessaire contre les facteurs de risque des maladies cardiovasculaires : pas de tabac, dépister le diabète et les hypercholestérolémies, lutter contre la sédentarité en pratiquant régulièrement de l’activité physique simple et lutter contre la surcharge pondérale.