« En 2005, une marque de pacemaker allemande a inventé la télécardiologie, indique le Dr Bruno Degand, rythmologue au CHU de Poitiers. Elle a créé un système qui permet au défibrillateur implanté dans le corps du patient de communiquer avec un appareil extérieur. » Une petite révolution dans le monde de la cardiologie. D’ailleurs quatre autres fabricants s’y sont mis depuis. L’appareil, qui prend la forme d’une box, collecte les informations enregistrées par le pacemaker toutes les nuits, prévient le médecin en cas d’alerte (notamment quand le patient a reçu un choc électrique) et lui envoie des rapports tous les trois mois si tout va bien. « Mais attention, ce n’est pas une présence verte, précise le cardiologue. L’appareil n’appelle pas le Samu en cas d’alerte. »
Les avantages de ce dispositif sont importants : en plus d’alerter le médecin en cas de choc électrique, ce système évite aux patients de venir tous les trois mois faire des contrôles systématiques qui s’avèrent souvent inutiles. Et non seulement, le capteur mesure le rythme cardiaque, mais il détecte aussi l’usure du défibrillateur, le niveau d’effort, la fréquence cardiaque et enregistre la ventilation, ce qui permet de détecter les apnées du sommeil.
“Les patients ne viennent plus qu’une fois par an voir leur médecin pour faire contrôler leur défibrillateur, indique le Dr Degand. Tout au long de l’année, nous pouvons accéder aux données des patients et surveiller l’évolution de leurs pathologies cardiaques. Ils nous voient moins souvent, mais pour un suivi plus précis. On diminue la médicalisation des porteurs de défibrillateurs. La télécardiologie s’intègre parfaitement dans la prise en charge globale du patient.” Et l’un des intérêts de ce suivi à distance est justement de pouvoir être pris en charge plus vite en cas d’alerte. “Une prise en charge rapide, c’est moins de complication et moins de temps d’hospitalisation”, résume le rythmologue.
450 patients sont actuellement suivis au CHU de Poitiers. Ils ont entre 15 à 85 ans et la majorité a entre 60 et 70 ans. La plupart se sentent mieux suivis médicalement grâce à la télécardiologie et acceptent cette surveillance à distance. Quand on sait que la sonde qui relie le cœur au défibrillateur bouge plus de 100 000 fois par jour, il est aussi rassurant pour eux de savoir que les alertes concernent aussi l’état du matériel implanté dans leur poitrine. De plus, ce type d’outil est intéressant dans le contrôle de la rééducation cardiaque, car l’amélioration de la contraction du muscle cardiaque se lit sur les courbes, une source de motivation pour de nombreux patients.
“L’intérêt de ce dispositif est aussi sociétal, poursuit le Dr Degand. On économise des coûts de santé en diminuant le nombre de visites et de déplacements des patients. La télémédecine permet aussi de suivre des patients qui sont loin, défavorisés ou en zone rurale, et qui ne seraient jamais venus tous les trois mois pour les contrôles.”
Avec 100 à 150 nouveaux patients porteurs de défibrillateurs par an, le potentiel de la télécardiologie est important, d’autant plus que, bientôt, les autres types de pacemakers vont aussi pouvoir être suivis à distance.