Équipements et innovations médicales

LE BLOC OPÉRATOIRE INTÉGRÉ

OLYMPUS DIGITAL CAMERALe « bloc opératoire intégré » répond aux nouveaux enjeux de la santé et de la pratique médicale.

L’augmentation des procédures mini-invasives qui s’appuient sur l’image (microscopie opératoire, colonne d’endoscopie…) a conduit au développement de ce bloc opératoire de nouvelle génération, qui tient également compte de l’extension des télécommunications dans les établissements de santé.

Le « bloc opératoire intégré » vise à faciliter la mise en oeuvre des nouvelles modalités de prise en charge des patients. Il permet aux équipes chirurgicales de procurer efficience technique et sécurité des soins.

Le concept du « bloc opératoire intégré » se traduit selon plusieurs niveaux d’intégration :

– Le premier niveau correspond au « bloc opératoire communicant ». Ce système importe des informations dans la salle d’intervention à partir du dossier patient informatisé afin de lire les données quelle que soit leur source. Il permet aussi l’affichage et la capture des informations produites à l’intérieur de la salle pendant l’acte chirurgical. Enfin, il offre la possibilité d’exporter des informations vers une salle d’enseignement ou de staff, un poste de travail ou une salle du programme opératoire.

– Le deuxième niveau d’intégration, que l’on pourrait appeler « bloc-otique », est inspiré de la domotique. Ce module propose de contrôler les équipements médicaux et non médicaux, à partir de l’interface utilisateur unique. Au CHU de Poitiers, le chirurgien pourra commander une interface dans la zone stérile tandis qu’une infirmière de bloc opératoire (IBO) pourra piloter une autre interface dans la zone non stérile. Des outils d’enregistrement peuvent également être intégrés en amont de l’intervention, pour préparer, installer ou programmer le geste chirurgical.

– Le troisième niveau, le plus élaboré, considère le bloc opératoire intégré comme « un nouveau concept architectural ». Ce module met l’accent sur l’optimisation de l’environnement pour l’équipe chirurgicale. Il réunit des équipes d’experts dans les domaines de l’architecture, la logistique, les technologies et les équipements médicaux… Il s’agit de créer un espace le plus ergonomique possible, en se réappropriant des concepts déjà existants et en en créant aussi de nouveaux.

Les interviews :
Interview du professeur Jean-Pierre Faure, PU-PH – chirurgie générale, digestive et chirurgie de l’obésité
Interview du professeur Bertrand Debaene, PU-PH – médecin anesthésiste
Interview d’Aurélie Supiot, ingénieure biomédicale

 

LA CHIP : UNE NOUVELLE RÉPONSE THÉRAPEUTIQUE AU CANCER DIGESTIF

Depuis mai 2008, les personnes atteintes d’un cancer digestif du type carcinose péritonéale trouvent au CHU de Poitiers une réponse thérapeutique à leur maladie grâce à la chimiothérapie intra-péritonéale (CHIP). Dispensée au sein du service de chirurgie viscérale, ce nouveau procédé garantit une survie de plusieurs années aux patients qui, sans elle, étaient condamnés au bout de quelques mois. Poitiers est le seul établissement de la région à la pratiquer.

Les cancers de l’appareil digestif constituent une des principales causes de décès par cancer. Leur évolution se fait selon trois voies différentes : les métastases viscérales (foie et poumons), les métastases ganglionnaires et les carcinoses péritonéales. Si les premiers peuvent être traités par chirurgie et/ou chimiothérapie et les seconds par chimiothérapie, les troisièmes étaient considérés comme une impasse thérapeutique jusqu’à l’apparition il y a une dizaine d’années de la chimio-hyperthermie intra-péritonéale (CHIP).

C’est le docteur Sugarbaker, chirurgien américain, qui a eu l’idée d’associer une résection chirurgicale maximum des tumeurs à une chimiothérapie intra-péritonéale. Avant ce procédé, la chirurgie se limitait à retirer les nodules et à traiter éventuellement de façon palliative une occlusion présente ou potentielle. Quant à la chimiothérapie par voie intraveineuse, elle ne pouvait que ralentir transitoirement l’évolution des carcinoses péritonéales. La survie du patient ne dépassait pas quelques mois.

Dans une logique de recours régional

Depuis mai 2008, le CHU de Poitiers propose au sein du service de chirurgie viscérale cette nouvelle réponse thérapeutique aux carcinoses péritonéales et assure ainsi son rôle de recours régional du pôle de cancérologie du CHU.

Aujourd’hui seuls vingt établissements en France la mettent en oeuvre.

La particularité de cette technique réside dans la combinaison de l’ablation complète des tissus tumoraux et de l’application directe de la chimiothérapie dans l’abdomen du malade. Cette administration de la chimiothérapie dans la cavité péritonéale permet d’avoir un maximum d’efficacité, sans toxicité, grâce à une concentration vingt fois supérieure à celle obtenue par voie intraveineuse. Un taux qu’il n’est pas possible d’atteindre par une administration systémique, sans provoquer de graves troubles chez le patient de type aplasie, par exemple.

Cette technique doit également son efficacité à la chaleur : Différentes études expérimentales ont démontré, d’une part, que cette dernière avait un effet cytotoxique pour les cellules tumorales ; d’autre part, qu’elle augmentait la pénétration intracellulaire de la chimiothérapie.

Malheureusement, toutes les carcinoses péritonéales ne peuvent être traitées par cette méthode. A l’heure actuelle quelques pathologies sont validées dont la première est la carcinose péritonéale d’origine colorectale. Ce qui est encourageant lorsque l’on sait que le cancer du colon est la deuxième cause de cancer en France. Et le gain pour le malade n’est pas négligeable : la survie des patients sans la CHIP est estimée de 7 à 18 mois maximum, avec la CHIP elle atteint 5 ans dans 40 % à 45 % des cas. Cette méthode a également été validée avec des résultats quasi similaires pour d’autres pathologies comme les mésothéliomes diffus du péritoine, maladie rare (2 à 5 cas par million d’habitants) mais en augmentation du fait de l’amiante, ou encore les pseudomyxomes du péritoine (1 cas par million d’habitants).

Des études sont en cours pour évaluer l’avantage de la CHIP dans les cas des cancers de l’estomac et de l’ovaire mais les résultats préliminaires ne sont pas concluants pour le moment.

Une sélection des patients extrêmement rigoureuse

La CHIP est une intervention chirurgicale lourde dont la durée opératoire peut s’étaler, suivant la gravité de la maladie, entre 5 heures et 12 heures. Concrètement, le traitement consiste dans un premier temps à supprimer les lésions tumorales visibles à l’oeil nu.

Ensuite, la paroi abdominale du patient est suspendue à un cadre de façon à former une cuvette. Cette dernière est remplie d’un liquide contenant la chimiothérapie, chauffée à 42 °C. Il circule, à l’aide d’une pompe, dans l’abdomen du malade pendant plus d’une heure. C’est l’action combinée de la chaleur et de la chimiothérapie qui détruit les cellules microscopiques restantes.

La toxicité des produits utilisés nécessite une protection spécifique (masque type Seveso, lunettes, gants&) du personnel médical et paramédical présent dans la salle d’opération ainsi que dans les 48 heures qui suivent l’intervention. Le séjour en réanimation chirurgicale peut durer d’une à trois semaines pour une durée d’hospitalisation totale de quinze jours à cinq semaines.

La lourdeur du protocole implique une sélection extrêmement rigoureuse et un âge inférieur à 60 ans. Elle est discutée dans le cadre de l’unité de concertation pluridisciplinaire d’oncologie (UCPO) qui réunit plusieurs spécialistes : oncologues médicaux, gastroentérologues, chirurgiens digestifs, radiologues et anatomopathologistes. Les pharmaciens sont également mis à contribution par les oncologues médicaux spécialistes de la chimiothérapie qui valident avec eux les doses à utiliser.

Cependant, la décision finale est prise en préopératoire par le chirurgien viscéral qui estime suivant le développement du cancer de la nécessité ou pas de réaliser la CHIP.