Neurochirurgie : l’IRM 3 tesla entre au bloc opératoire, un événement !

Réaliser des images par résonance magnétique à haut champ (3 tesla) pendant une intervention de neurochirurgie, c’est exceptionnel en France et ça se passe aussi au CHU de Poitiers. La première intervention faisant appel à l’IRM 3 tesla* peropératoire a ainsi été réalisée le 23 juin par les équipes du Dr Philippe Page, neurochirurgien, et du Pr Rémy Guillevin, radiologue.

L’intervention a été pratiquée sur un patient porteur d’une tumeur cérébrale frontale. « Après l’opération,  qui a duré environ deux heures, nous avons transféré le patient, toujours endormi, sur une table spéciale pouvant passer dans l’IRM, indique le Dr Page. Nous l’avons ensuite conduit dans la salle de l’IRM, attenante au bloc opératoire. » Toujours sous anesthésie générale et le crâne non refermé, mais recouvert et maintenu en condition stérile, des clichés du patient ont été réalisés pendant une vingtaine de minutes, dans le but de vérifier si l’intégralité des tissus tumoraux avaient été retirés. « Les images sont d’excellente qualité et ne laissent pas de place au doute », précise le Pr Guillevin. Toute la tumeur a bien été retirée lors de l’intervention, mais si toutefois un reliquat tumoral avait été visualisé, celui-ci aurait pu être enlevé dans le même temps opératoire, une avancée considérable pour le patient.

 

Le cerveau du patient avant l’opération était comprimé par une tumeur.

Après l’exérèse de la tumeur, une IRM du cerveau est réalisée pour vérifier que l’intégralité des tissus tumoraux ont été retirés.

« Ce type d’intervention demande une excellente coordination entre les neurochirurgiens, les anesthésistes, les radiologues et les équipes du bloc et les manipulateurs IRM, expliquent de concert le Pr Guillevin et le Dr Page. Il faut également beaucoup d’anticipation pour que tout se déroule sans problème. » L’IRM 3 tesla utilisée lors de l’intervention n’est en effet pas dédiée au bloc opératoire et a une activité quotidienne partagée avec l’activité clinique classique et les activités de recherche en imagerie gérées par le laboratoire Dactim-mis**. L’air de la salle doit être extrait et recyclé au moins une heure avant que le patient n’y entre. De plus, aucun objet en métal ne doit être introduit dans cette salle, ce qui demande un équipement spécifique (le métal de la tétière a été remplacé par du carbone par exemple) et une attention toute particulière des participants à l’intervention.

« Nous avons réalisé plusieurs simulations afin de ne commettre aucune erreur le jour de la première intervention, illustre le Dr Page. Cela a été très bénéfique. Nous avons pu vérifier et compléter les check-lists fournis par le fabricant de l’IRM. »

 

Une porte relie l'IRM 3 tesla du centre cardio-vasculaire au bloc opératoire attenant.

Recherche clinique
« L’utilisation de l’IRM peropératoire se fait sur le temps consacré à la recherche clinique, ajoute le Pr Guillevin. Au CHU de Poitiers, nous avons la chance de posséder le seul IRM 3 tesla dotée d’une imagerie multinoyaux contiguë à un bloc opératoire en Europe et nous sommes heureux de participer à des programmes si innovants. » Le laboratoire Dactim travaille notamment sur la production d’informations complémentaires à transmettre au neurochirurgien pendant le contrôle mais aussi après, dans les dix minutes que dure le retour du patient dans le bloc opératoire. « Cela demande beaucoup de travail et de formation de la part des ingénieurs, des radiologues et du personnel paramédical pour traiter toutes ces images en si peu de temps », poursuit le Pr Guillevin.

L’objectif du service de neurochirurgie et du laboratoire Dactim est maintenant de pouvoir réaliser chaque semaine plusieurs interventions faisant appel à l’IRM peropératoire. Pour l’instant, les patients susceptibles de bénéficier de cette technique sont ceux porteurs de métastases, de méningiomes, de gliomes et de lésions de l’hypophyse. « Mais nous espérons élargir les indications à l’avenir », annonce le Pr Guillevin.

*Financée avec le soutien de l’Union européenne.

** Dactim-mis (Data Analysis and Computation Through Imaging & Modeling) constitue ainsi une des équipes de l’UMR- CNRS-LMA (Laboratoire, mathématiques et applications). Cette équipe, dirigée par le Pr Rémy Guillevin, s’intéresse à l’extraction et la modélisation mathématique de paramètres issus de l’imagerie médicale en exploitant les systèmes d’imagerie (notamment du centre cardio-vasculaire. Il s’agit de mettre en place des applications utilisant l’imagerie afin de mieux guider et adapter les chirurgies anticancéreuses des lésions tumorales cérébrales et, à terme, d’autres organes.

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