Le premier neurostimulateur dite « en boucle fermée » a été implanté en France, le 24 janvier, au CHU de Poitiers par l’équipe du Pr Philippe Rigoard, neurochirurgien, responsable du service de neurochirurgie du rachis, chirurgie de la douleur et du handicap. Une innovation qui promet d’améliorer le quotidien des patients souffrants de douleurs lombaires chroniques réfractaires.
Près de 12 millions de personnes en France souffrent de douleurs chroniques, des douleurs qui altèrent considérablement leur qualité de vie. La neurostimulation médullaire peut être proposée lorsque les douleurs chroniques sont réfractaires aux différents traitements. Développé depuis les années 1980 en France, le neurostimulateur médullaire est un dispositif médical dont le fonctionnement s’apparente à celui d’un pacemaker. Il produit des impulsions électriques qui sont relayées par une électrode positionnée en regard de la moelle épinière du patient. Les impulsions brouillent les messages douloureux avant qu’ils n’arrivent au cerveau ce qui permet d’atténuer la douleur.
L’implantation de neurostimulateurs médullaires est pratiquée au CHU de Poitiers depuis les années 2000 dans le service de neurochirurgie du rachis dirigé par le Pr Philippe Rigoard. « Si un patient souffre de douleurs chroniques lombaires isolées (c’est-à-dire sans sciatique associée), le but de notre prise en charge doit être de tout mettre en œuvre pour éviter une opération de la colonne vertébrale. En effet, les études ont révélé que la chirurgie rachidienne n’a pas démontré sa supériorité par rapport à une rééducation bien conduite. Nous sommes, aujourd’hui, dans un changement de paradigme qui nous amène à reconsidérer des thérapeutiques beaucoup moins invasives plutôt que de procéder à une chirurgie du dos. Parmi les patients ayant subi ces opérations, près de 40 % gardent ou développent des douleurs chroniques lombaires réfractaires. Malheureusement, trop souvent encore, nous ne voyons ces patients qu’en bout de course, de nombreuses années après l’apparition des douleurs, pour discuter des techniques de stimulation médullaire, considérées à tort comme des techniques de dernier recours. Plusieurs milliers de neurostimulateurs médullaires ont été posés en France l’année dernière et la majorité de ces patients, aujourd’hui évalués par des techniques rigoureuses dans le cadre d’un registre Français, témoignent de l’amélioration de leur quotidien apporté par ces dispositifs », souligne le Pr Rigoard.
L’équipe du CHU de Poitiers a procédé, le 24 janvier, à l’implantation d’un tout nouveau type de neurostimulateur médullaire : un stimulateur médullaire en boucle fermée capable de mesurer 3 millions de fois par jour l’activité du système nerveux et de s’en servir pour optimiser et personnaliser le traitement automatiquement, en temps réel, au plus proche des besoins du patient. Il s’agit du tout premier patient implanté en France. Appelé Inceptiv, ce nouveau dispositif est conçu par la société Medtronic[1]. Comme les précédents équipements, il stimule la moelle épinière, mais il enregistre en même temps la réponse du système nerveux à la stimulation. Cet enregistrement permet de personnaliser en temps réel le traitement pour une efficacité thérapeutique optimum. « C’est un dispositif en boucle fermée. L’électrode reliée au stimulateur est équipée de capteurs, elle transmet la stimulation et analyse la réaction du système nerveux à cette stimulation. Grâce au système de boucle fermée, le stimulateur adapte la stimulation en permanence et permet de gagner en confort, en efficacité et de doser au plus juste l’énergie requise pour le patient, en fonction de ses mouvements ». L’intervention, qui a duré près d’une heure et demie, a été réalisée sous anesthésie éveillée, grâce à la complicité et la collaboration sans faille entre le neurochirurgien, l’équipe d’anesthésie et un hypnothérapeute, pour que des échanges avec le patient permettent de positionner précisément l’électrode au bon endroit.
[1] C’est le tout premier stimulateur médullaire en France compatible avec les IRM 3 Tesla , ouvrant des possibilités étendues d’imagerie diagnostique pour le patient.