Chirurgie cardio-thoracique : « Jamais la première fois sur un patient »

Des tables d’opération, des chirurgiens, des moniteurs, des robots, des consommables, des patients… Ce jeudi 28 janvier, on se croirait à s’y méprendre dans un bloc opératoire. A quelques détails près. Les patients du jour se révèlent être des modèles cadavériques, « ranimés » par la magie du numérique, autrement nommés SimLife.

Cette simulation haute-fidélité est une ressource précieuse pour la formation des internes de chirurgie thoracique, cardiaque et vasculaire en fin de cursus. Et c’est à Poitiers, dans les locaux de l’ABS-Lab, que les professeurs Christophe Jayle et Pierre Corbi, chirurgiens cardio-thoraciques au CHU de Poitiers, initient leurs futurs confères à la maîtrise de techniques chirurgicales telles que la thoracotomie ou la thoracoscopie assistée ou non par robot. Car c’est là le point fort de cette formation : « Pour la première fois, nous proposons aux apprenants la simulation robotique avec le Da Vinci, en partenariat avec la société Intuitive. C’est quelque chose d’assez unique car, jusqu’alors, il n’y a qu’à Poitiers que c’est possible ». C’est la troisième fois que le CHU de Poitiers accueille des internes en chirurgie cardio-thoracique et vasculaire, avec une particularité cette année : « La formation par simulation est désormais obligatoire et les internes en fin de cursus doivent valider deux modules ». Elle s’organise désormais sous l’égide de la Société française de chirurgie thoracique et de chirurgie vasculaire. L’ABS-LAB peut aussi compter sur le soutien de partenaires industriels autres qu’Intuitive à l’instar de Gamida, Ethicon, Abbott, LivaNova, Europrisme et AB Medica.

24 étudiants, huit « patients »

La formation dure deux jours et concerne 24 internes et chefs de cliniques, venus de toute la France. Outre les professeurs Christophe Jayle et Pierre Corbi, coordonnateurs de la formation, d’autres noms de la chirurgie cardio-thoracique et vasculaire ont fait le déplacement à Poitiers. C’est le cas du professeur Jean-Philippe Avaro, chirurgien thoracique militaire au centre hospitalier de Toulon : « Le gros avantage du SimLife, c’est que l’on est dans le calme. C’est d’autant plus important que les étudiants s’exercent ici à des gestes très complexes comme la thoracoscopie. Nous sommes sur des modèles ventilés et revascularisés, ce qui rend les conditions de cette formation très proches de la réalité ». Des propos que ne contredit pas son confrère du CHU de Tours, le docteur Antoine Legras : « Habituellement, nous nous formons sur des modèles cadavériques standards ou sur des modèles animaux vivants. Pour ces derniers, nous sommes essentiellement confrontés à la complexité de la législation et au fait que l’anatomie reste très différente de l’Homme. »

1 500€ par étudiant

Organiser un tel événement demande du temps : deux mois selon le professeur Christophe Jayle. Il peut compter sur la présence indéfectible du créateur du SimLife, Cyril Brèque, responsable du pôle biomécanique à l’ABS-lab. Ce dernier assure la logistique, la maintenance et l’assistance aux formateurs depuis la mise en route du laboratoire de simulation haute-fidélité en 2016 : « Je m’assure d’avoir des corps, que les étudiants les préparent. Pour cette formation, j’en mobilisé huit… Notre devise, c’est : ‘jamais la première fois sur un patient’, donc c’est important, pour nous, d’avoir des dons de corps car c’est ce qui permet aux internes de se former avant d’exercer en situation réelle ». Entre les repas, l’hôtel, la technique, la mobilisation du matériel, le coût revient à 1 500€ par étudiant… Mais quand on sait que le bénéfice revient au patient, « cela n’a pas prix ».