Ce mardi 14 mars n’a pas été une journée comme les autres pour le Pr Xavier Dufour, chirurgien ORL au CHU de Poitiers, et son équipe. Déjà, c’est une femme qui va être opérée d’une oropharyngectomie par voie transorale, soit une ablation d’une tumeur cancéreuse située dans la gorge, alors que cette pathologie concerne principalement les hommes. Mais aujourd’hui, ce qui n’est pas habituel, c’est la réalisation de l’intervention grâce au robot chirurgical Da Vinci de dernière génération acquis par le CHU en septembre 2015.
Après avoir suivi une formation théorique puis un stage pratique à Strasbourg, le Pr Dufour va opérer pour la première fois avec le robot chirurgical au CHU de Poitiers, assisté par le Pr Sylvain Morinière, chirurgien ORL au CHU de Tours. « Au lieu d’ouvrir le cou et la gorge de la patiente pour retirer la tumeur, nous passons par voie endobuccale, explique le chirurgien. Cela permet de réduire le risque infectieux et d’œdème, ainsi que les douleurs pour les patients. Et pour le chirurgien, c’est très agréable d’opérer avec un outil aussi intuitif. Le degré de liberté est inégalé grâce aux pinces qui pivotent sur 360° et la vision 3D est incroyable, c’est comme si on était dans la bouche du patient. »
Un écarteur spécifique
Le Pr Dufour va donc retirer la tumeur à 2 mètres de la patiente, en commandant les bras porte-instruments du robot depuis une console équipée d’un écran 3D. Seul trois des quatre bras du robot sont utilisés dans la chirurgie robotique ORL, dont un pour la caméra. Pour accéder à la gorge du malade, il faut installer les bras porte-instruments à travers un écarteur, mis au point par le Pr Morinière. Fort de ses neuf années d’expérience dans ce type de chirurgie, il a pu constater ses avantages : « La durée moyenne d’hospitalisation est passée de onze jours à une semaine et le nombre de patients trachéotomisés a été divisé par six. »
Pour Aline Sauvignon, infirmière de bloc opératoire (Ibode) d’ORL, et pour Eléonore Chary, interne en ORL, cette chirurgie transorale robotique est aussi une première. Aline a suivi une formation spécifique mais, ce mardi, Stéphanie Keav, Ibode en urologie – le service qui utilise le plus le robot -, est également présente pour assister ses collègues. La responsabilité d’Aline Sauvignon et d’Eléonore Chary est importante, ce sont les seules personnes à être habillées en tenue de bloc stérile. Ce sont elles qui installent le robot au-dessus de la bouche de la patiente, changent les instruments au bout de ses bras, gèrent l’aspiration, récupèrent la tumeur et s’assurent que la bouche du patient n’est pas blessée par le matériel médical tout au long de l’intervention.
Du côté de la console de commande, le Pr Dufour est dans son élément. La dissection de la tumeur est rapide et précise. La communication entre le chirurgien et les Ibode est fluide. Une fois l’intégralité de la tumeur retirée, la pression retombe. Le robot peut alors être mis de côté et l’opération se poursuit par la réalisation d’un curage ga nglionnaire, soit l’ablation des ganglions du cou. « Je suis très satisfait de cette première, affirme le Pr Dufour. Tout s’est bien passé et la patiente va pouvoir sortir dans quelques jours. »
Des indications spécifiques pour la chirurgie robotique Les tumeurs bénignes (tumeurs non cancéreuses, kystes…) et malignes de l’oropharynx (partie de la gorge située en arrière de la bouche et comprenant notamment les amygdales), de l’hypopharynx (partie inférieure du pharynx) et du larynx sont les principales pathologies ORL qui peuvent être traitées par le robot chirurgical, à condition qu’elles ne soient pas trop importantes. Pour cela, elles doivent être diagnostiquées le plus tôt possible. L’association alcool-tabac est souvent à l’origine de ces tumeurs, mais le papillomavirus peut aussi en être responsable. La plupart des personnes atteintes par ces tumeurs sont des hommes âgés de 55 à 65 ans. Les symptômes qui doivent alerter sont des douleurs dans l’oreille, une gêne pour avaler et/ou l’apparition de ganglions dans le cou. Le syndrome d’apnée du sommeil, quand il est dû à des amygdales de la base de la langue trop importantes, peut également être traité par la chirurgie robotique. |
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