Réanimations : une chambre des « erreurs » pour apprendre

Clarisse est infirmière en médecine intensive réanimation. Sa collègue, Aurélie occupe le même poste dans le pool des réanimations (Cf. CHU Infos du mois de mars 2019). Il y a un an, l’idée de créer une chambre des erreurs ou « comment apprendre par l’erreur » a émergé. Cette innovation sert la pédagogie dans le milieu paramédical et est destinée, pour l’instant, aux aides-soignants et aux infirmiers (des étudiants infirmiers et élèves aides-soignants ont également testé) des quatre réanimations adultes et de l’unité de soins continus du centre hospitalier universitaire de Poitiers.

Des erreurs difficiles à déceler
Le principe de cette chambre, pas tout à fait comme les autres, est simple. Clarisse et Aurélie utilisent un box de réanimation standard et y glissent tout simplement des erreurs, de gravités différentes. Un binôme aide-soignant et infirmier entre dans cette chambre et doit, dans un laps de temps d’une dizaine de minutes, retrouver un maximum de bévues. Vient ensuite un débriefing d’un quart d’heure. Sur le papier, cela semble simple, mais la réalité offre quelques surprises. « Il y a des erreurs que peu de personnes trouvent comme le mode inversé sur l’humidificateur. Et il y en a d’autres qui sont démasquées très vite comme le dépassement des péremptions antiseptiques », s’amusent Clarisse et Aurélie. Et même leurs cadres s’y sont frottées. Nadine Bernardeau, cadre supérieur de santé du pôle USSAR, Christelle Plumereau, cadre de santé de la réanimation chirurgicale, et Marie-Line Debarre, cadre de santé de médecine intensive réanimation, se sont non seulement prêtées au jeu de la chambre des erreurs, mais elles soutiennent aussi le projet de leurs infirmières. « Plutôt que de pointer du doigt l’erreur, on s’en rend compte soi-même, on se corrige, on argumente. La pédagogie par l’erreur est plus valorisante parce qu’on prend le temps de s’écouter entre collègues », souligne Nadine Bernardeau. Les erreurs à déceler portent uniquement sur l’espace et les gestes quotidien et ne tiennent pas compte des particularités de chacune. « Cette idée est le prolongement du projet d’harmonisation des pratiques dans les réanimations amorcé en 2017 », ajoute Marie-Line Debarre. Ce système semble porter ses fruits puisque le duo a déjà organisé plus d’une quinzaine de cessions en un an.

Aurélie et Clarisse, infirmières en réanimation, préparent les erreurs que devront déceler leurs collègues.

Un outil pédagogique avant tout
Dans un premier temps, les passages dans la chambre des erreurs s’organisent sur la base du volontariat, mais à terme, le duo compte étendre leur champ d’action à tous leurs collègues des réanimations. « Notre but premier est de créer un outil pédagogique pour améliorer les pratiques et sécuriser la prise en charge de nos patients, précisent-elles. Anciens comme nouveaux, nos collègues se prêtent bien au jeu et la remise en question est systématique. » En 2020, Clarisse et Aurélie, soutenues par leurs cadres, présenteront la chambre des erreurs au prochain congrès de la Société de réanimation de langue française.