Le projet d’établissement 2013-2017 avait validé le principe de création d’une structure d’accueil tournée vers la "promotion de la santé". En phase de concrétisation, elle est destinée à rendre le patient acteur de ses soins.
L’hôpital d’aujourd’hui est très développé sur le plan thérapeutique, le diagnostic et les soins, avec un niveau de qualité et d’excellence reconnu. Mais il l’est encore trop peu sur la prévention. « Pendant longtemps on considérait même que ce pan de la santé n’entrait pas vraiment dans son rôle, estime le Pr Virginie Migeot, médecin en santé publique, qui développe ce projet au CHU. La prévention était laissée à bien d’autres structures, depuis les écoles jusqu’aux associations… »
Dans un mouvement parallèle, la qualité des soins et la technicité dans les services progressent et le besoin émerge de compléter les réponses apportées au patient. Beaucoup, atteints notamment de maladies chroniques comme le diabète ou le cancer, ont besoin d’information tout au long de leur prise en charge médicale, d’être accompagnés et d’être formés aux moyens de vivre avec la maladie. Aujourd’hui, l’information et l’éducation du patient sont faites au moment de la consultation. Or, un excès d’informations délivrées simultanément entraîne une mauvaise assimilation. « Forts de ce constat, on a réfléchi à un autre modèle qui permette de mieux prendre en compte l’ensemble des déterminants de la maladie et le malade dans sa globalité. »
Dès lors, ces déterminants sont appelés à être considérés sous d’autres angles : le logement, la manière dont on vit et la manière dont on s’alimente. Cette approche de santé publique prend en compte des cercles concentriques autour du patient, chacun contenant des facteurs impactant la santé. Changer les comportements du patient est plus facile quand on appréhende son environnement.
Puisqu’il s’agit de montrer au patient qu’il est considéré comme une personne, la maison de la santé publique sera différente d’une structure hospitalière classique. Elle comprendra une pièce de vie, une cuisine, des chambres, un bureau, etc. Il ne s’agit pas d’y rassembler des compétences médicales et techniques qui existent dans les services mais d’y faire ce que les autres ne font pas. « Nos collègues ont des programmes d’éducation thérapeutique, par exemple pour les patients diabétiques, mais on y ajoutera des actions comme des ateliers pour passer du savoir au savoir-faire en rendant les patients plus actifs au-delà de la transmission d’informations », poursuit le Pr Migeot.
Prévention des complications chez les malades et prévention chez les accompagnants volontaires, les actions seront complémentaires. Dans cette maison, on parlera de santé plus que de soins.
Emotion et changement
Education, accompagnement, conseil seront apportés par une équipe de différents professionnels : une infirmière coordonnatrice en lien avec celle des services, deux animateurs d’activité de santé publique, des éducateurs sportifs, des diététiciennes, des psychologues, etc. et un peu à l’image des Maggie’s Centres en Angleterre, où les malades atteints de cancer peuvent parler de leur vie avec et après la maladie. Les patients s’y retrouvent pour échanger leurs préoccupations dans un environnement qui colle au sujet.
La prise de conscience d’un comportement qui n’est pas favorable à notre santé est complexe, et relève de différents facteurs. Ce lieu sans hébergement sera aussi celui d’expériences esthétiques et sensorielles. Il est démontré que pour changer une façon d’être ancrée en soi, il faut que le ressenti soit fort. L’émotion facilite le changement.
Le projet initié par la direction et le conseil de surveillance a reçu le soutien de l’Agence régionale de santé et du fonds Aliénor. Une équipe se constitue autour du Dr Marion Albouy-Llaty, chef de projet de la maison, qui est en lien avec les différents services et qui assure déjà la coordination des programmes d’éducation thérapeutique existants. La plateforme servira aussi à des associations de patients qui pourront si elles le souhaitent y mener des actions. La notion d’hôpital « promoteur de santé », défendue par l’Organisation mondiale de la santé, a de l’avenir.
Les perturbateurs endocriniens au crible
L’étude Preved, projet de recherche soutenu par la Fondation de France, a pour objectif de diminuer l’exposition des femmes enceintes aux perturbateurs endocriniens, ces substances chimiques naturelles ou industrielles très présentes dans la vie quotidienne (pesticides dans l’alimentation, plastiques, revêtement de boites de conserves, produits de maquillage et à usage corporel comme le dentifrice). Le projet s’appuie sur des actions déjà menées en prévention auprès des femmes enceintes dans le quartier des Couronneries à Poitiers (Atelier du 19) pour sensibiliser aux perturbateurs endocriniens. Le projet s’inscrit dans l’axe de recherche Hedex (Health, Endocrine Disruptors, Exposome) du centre d’investigation clinique Inserm 1402. Il mobilise dix enseignants chercheurs et il est interdisciplinaire, comprenant chimiste, chimiste analytique, cynéticien, épidémiologistes. Ces chercheurs souhaitent répondre à deux questions : comment mieux estimer l’exposition humaine aux perturbateurs endocriniens et comment réduire l’exposition à ces substances ? La maison de la santé publique sera une plateforme idéale pour développer des projets de recherche interventionnelle comme l’étude Preved (Pregnancy Prevention Endocrine Disruptor). |