Secteur médico-social : un secteur tourné vers l’avenir

Avec la fusion du CHU de Poitiers et du Groupe hospitalier Nord-Vienne, le secteur médico-social du CHU a fortement augmenté. Il compte actuellement plus de 800 lits répartis sur cinq sites. Pour la meilleure coordination du secteur, la direction générale en a fait une direction depuis septembre 2020 avec à sa tête Elise Benyayer qui, de plus, pilote un important projet médico-social.

Que se cache-t-il derrière les termes du médico-social ?

Le médico-social concerne les EHPAD auquel j’intègre les unités de soins de longue durée (USLD) parce qu’elles présentent les mêmes enjeux. Les USLD sont des unités plus médicalisées qui imposent la présence d’une infirmière la nuit et une continuité médicale. Nous avons également des unités d’hospitalisation renforcée qui sont des petites unités entre treize et quatorze lits dont l’objectif est de prendre en charge des personnes Alzheimer et maladies apparentées qui souffrent de troubles sévères du comportement. Elles sont sécurisées pour permettre aux résidents d’aller et venir. A la différence des services sanitaires, les résidents de ces unités paient leur séjour. Même si la prise en charge médico-soignante est importante, il s’agit surtout d’un lieu de vie où les résidents sont juridiquement à domicile. C’est cet aspect qui doit primer : restituer cette atmosphère de convivialité, de confort et de sécurité tout en leur permettant de maintenir des liens avec l’extérieur. Cela n’a pas été facile pendant la crise sanitaire puisque nous avons dû garder les résidents dans leur chambre pour les protéger du virus. C’est quelque chose que les résidents, les familles et les soignants ont très mal vécu.

Quelles sont vos principales missions ?

Mes principales missions sont la coordination du secteur médico-social et le développement du projet médico-social. Je coordonne les secteurs médico-sociaux des cinq sites du CHU répartis sur le département de la Vienne. Ils ont chacun une histoire et une identité propres, des fonctionnements différents. Il est essentiel de créer des liens entre ces sites. Cela ne veut aucunement dire que tous doivent faire exactement les mêmes choses. L’idée n’est pas de formaliser ou d’harmoniser totalement le secteur médico-social mais de faire en sorte qu’il y ait des échanges, un dialogue. Certains aspects concernant notamment le nursing seront identiques. Mais il s’agit surtout de tirer profit des expériences positives des uns pour les appliquer aux autres. De nombreuses initiatives se mettent en place dans ces lieux de vie justement pour renforcer l’aspect de convivialité. Même si nous échangeons régulièrement par mail ou en visio, il est important de de nous rencontrer pour renforcer le lien. Ma seconde mission concerne la mise en œuvre du projet médico-social intégré au projet d’établissement du CHU de Poitiers. C’est un projet pluridisciplinaire pour lequel nous réunissons les médecins, les cadres, les professionnels de tous les sites sous forme de groupes travail. Il existe dix groupes de travail abordant les thématiques principales des EHPAD (approche soignante, projet de vie, innovation, animation communication, développement durable…). Ce projet crée vraiment une dynamique, en valorisant l’identité propre au médico-social. Il est tout aussi important de travailler sur le confort des résidents que sur la valorisation des professionnels.

Quels sont les atouts du secteur médico-social du CHU de Poitiers ?

Les EHPAD du CHU de Poitiers disposent de médecins gériatres qui assurent la prise en charge médicale et un suivi médical régulier de nos résidents. Une attention particulière est portée sur les médicaments. Les personnes âgées doivent prendre beaucoup de médicaments et nos professionnels essayent de les limiter et de limiter la iatrogénie*. Sur chaque pôle, nous avons des pharmaciens. Dans les EHPAD de ville, ce sont les médecins traitants qui interviennent auprès des résidents avec médecin coordonnateur qui coordonne l’intervention des médecins.

Quelle prise en soins proposez-vous à vos résidents ?

Actuellement, les personnes âgées restent de plus en plus longtemps chez elles. Lorsqu’elles nous sont adressées, c’est que leur état s’est dégradé. Lorsqu’elles arrivent, elles sont très dépendantes : dépendance physique et/ou troubles cognitifs. La prise en charge est médicale mais il y a surtout des soins de nursing. Les résidents ont besoin d’aide pour leur toilette, pour manger ou s’habiller et puis également pour se déplacer. Il est important de leur permettre de se mouvoir sinon ils peuvent vite devenir encore plus dépendant. Lorsque nous accueillons un nouveau résident, nous mettons en œuvre pour lui un projet de vie en concertation avec les équipes pluridisciplinaires de l’institution. Nous réfléchissons à ce que la structure va pouvoir lui apporter en fonction de son ancien métier, de ses passions, de sa volonté de rencontrer les autres, etc. Il s’agit d’un véritable projet de vie personnalisé.  Et développer la constitution des projets de vie des résidents sur l’ensemble des sites fait partie du projet médico-social. Il ne faut en aucun cas voir l’accueil en EHPAD comme une fin de vie mais bien comme une suite.

Quels sont les enjeux du secteur médico-social du CHU de Poitiers ?

Nous devons trouver l’équilibre entre l’aspect médicalisé de nos EHPAD tout en accentuant le côté domicile. Un équilibre entre ce qui est notre cœur de métier, c’est-à-dire une prise en charge médico-soignante de qualité, et le volet convivialité, confort et prestations hôtelières dans un contexte de concurrence. Le deuxième aspect prend de plus en plus d’importance d’autant plus que nos résidents restent en moyenne quatre ans au sein de l’institution. Nous devons leur offrir une atmosphère qui soit chaleureuse, conviviale. Une atmosphère qui permette à tous de se sentir bien, en termes de confort comme d’humanité. L’autre enjeu qui me tient vraiment à cœur, c’est d’apporter de l’innovation dans les EHPAD. Il y a tout un réseau économique, la silver économie et la silver geek, qui tend à se développer autour des séniors. Au vu du nombre important des lits dans le médico-social, nous souhaitons être identifié comme partenaire principal des entreprises qui créent des outils technologiques pour le 3e âge. Nous pourrons leur permettre de tester leurs produits en concertation avec nos médecins tout cela pour améliorer le quotidien grâce à la technologie, toujours avec l’accord des résidents. Notre secteur est vraiment dans une dynamique tournée vers le futur. Cet enjeu s’inscrit dans le projet médico-social avec le groupe de travail « l’EHPAD du futur » un sous-groupe « innovation ». Très prochainement, nous allons développer un projet de jeu vidéo innovant pour stimuler les personnes âgées.

Le métier de soignant en EHPAD est souvent dévalorisé. Qu’en pensez-vous ?

Régulièrement, la presse parle de maltraitance lorsqu’elle évoque les EHPAD. Il s’en suit souvent une généralisation qui est très mal vécue par les professionnels du terrain qui œuvrent chaque jour au bien-être des personnes âgées. De plus en plus les soignants qui travaillent dans les EHPAD/USLD ont choisi cette voie. C’est un métier particulièrement humain de par les relations qui se créent entre les soignants et les résidents. C’est aussi un métier technique et très physique. Pour éviter les comportements inappropriés, les soignants suivent des formations à la bientraitance. De plus dans le cadre du projet médico-social nous allons créer des espaces de réflexion éthique sur chaque site. Nous allons former deux référents par sites, soignants ou cadres, pour coordonner les ateliers de réflexion chaque trimestre qui permettront aux soignants qui le souhaiteraient, d’évoquer leurs difficultés au quotidien, d’échanger avec les autres.

Comment sera l’EHPAD de demain ?

L’EHPAD de demain sera plus ouvert vers l’extérieur, plus intégré dans les territoires. Les EHPAD ne doivent pas être des lieux où les personnes sont enfermées. Il faut qu’elles puissent sortir de l’établissement. Mais il s’agira aussi de faire venir la population locale dans l’EHPAD. Cet EHPAD de demain est l’un des angles abordés dans le projet médico-social. Il s’agira de recréer du lien entre les résidents et leur commune.

 

*La iatrogénie médicamenteuse désigne l’ensemble des effets indésirables provoqués par la prise d’un ou plusieurs médicaments