Typhaine Tenaud : infirmière en pratique avancée en centre pénitentiaire

Typhaine Tenaud

Le parcours professionnel de Typhaine Tenaud est varié. Diplômée de l’institut de formation de soins infirmiers de Poitiers en 2005, elle intègre les urgences adultes du CHU de Poitiers. Après plusieurs années d’exercice, elle rejoint le site de Châtellerault pour intégrer l’équipe d’urgence/SMUR.

Afin d’évoluer dans son parcours professionnel, elle se met en disponibilité de l’hôpital pendant deux ans et exerce sur un poste d’infirmière coordinatrice en EHPAD. Cela lui permet d’acquérir des connaissances extra-hospitalières. Elle revient ensuite au CHU de Poitiers, en unité de soins continus et aux urgences, durant la crise sanitaire.

En 2021, la faculté de médecine de Poitiers ouvre le master infirmier en pratique avancée. Elle se positionne pour intégrer la formation en auto-financement. « Cette démarche était spontanée et personnelle. La profession d’infirmière en pratique avancée me permettait d’envisager une nouvelle pratique de mon métier avec plus de responsabilité et plus d’autonomie. Cette période de formation fût intense, je travaillais à mi-temps aux urgences pour financer mes études ».

Typhaine Tenaud a eu « la chance » d’être rattachée au projet de création de poste d’une infirmière en pratique avancée au sein de l’unité de consultation ambulatoire de la prison de Vivonne qui fait partie du pôle urgences, SAMU-SMUR, anesthésie et réanimations. L’objectif est de pouvoir y accompagner les patients atteints de pathologies chroniques, en complémentarité des médecins et au sein d’une équipe pluridisciplinaire. Il y a actuellement près de 800 détenus sur la prison de Vivonne. Une équipe pluridisciplinaire se relaie pour assurer l’accès aux soins. À ce jour, l’équipe est composée de sept infirmières, d’une assistante dentaire, d’une infirmière en éducation thérapeutique, de six médecins et d’une cadre de santé. D’autres professionnels de santé y assurent des vacations : dentistes, gynécologue, hépatologue, opticien, kinésithérapeute, manipulateurs d’éléctroradiologie médicale, podologue. Les détenus bénéficient d’une présence paramédicale de 7h30 à 18h30 la semaine et de 8h à 16h le weekend. La présence médicale est continue ; les internes du CHU assurent les gardes de nuits et de weekend, en complément des journées assurées par les médecins.

 « Il est important de rappeler que si les détenus sont privés du droit d’aller et de venir, ils ne sont pas privés du droit à la santé et doivent bénéficier du même accès aux soins que la population générale ».

Typhaine a pris ses fonctions d’infirmière en pratique avancée en juillet 2023. « Je continue de prendre mes marques. L’implantation d’un nouveau métier est un challenge pour lequel il faut définir les nouvelles missions, mais les choses commencent à se roder ». 80 % de son temps d’activité est réservé aux consultations pour les patients porteurs de maladies chroniques qui ont besoin et souhaitent un suivi. Cela concerne 10 à 15 % de la population carcérale de Vivonne. Elle s’assure de la stabilité des patients dans leur pathologie chronique, le temps de l’incarcération.

« Le fait que les patients soient incarcérés ne change rien à mes pratiques. Toutefois, il s’agit bien souvent de patients éloignés du système de soins, plus vulnérables. Les temps de consultation avec l’infirmière en pratique avancée permettent de créer une alliance thérapeutique et de développer les compétences psychosociales leur permettant d’être acteurs dans leur parcours de soin. J’ai la chance de bénéficier de créneaux de consultations de 30 à 45 minutes. Nous avons le temps de prendre le temps ».

Ce que Typhaine Tenaud aime dans le développement de ses compétences infirmières, c’est de pouvoir contribuer à garantir l’accès à la santé de cette population vulnérable. « Ce sont des personnes qui sont riches d’un parcours particulier, dans un milieu complexe, avec des codes spécifiques, mais qui donne lieu à de belles rencontres. Nous apprenons des choses tous les jours ».  Le poste d’infirmière en pratique avancée permet à Typhaine Tenaud d’avoir une dynamique de santé globale très intéressante. « Je pense qu’il est amené à se développer dans tous les centres pénitentiaires parce que les patients sont demandeurs. Il y a des besoins de santé importants. La population carcérale vieillit, le nombre de maladies chroniques augmente ».

Parallèlement à son activité clinique, Typhaine Tenaud bénéfice d’un temps hors clinique et hors les murs de la prison, dans un bureau au sein des urgences. Ce temps permet la réalisation de tâches administratives, la participation au développement de projets de recherche paramédicale sur la population carcérale, encore trop peu étudiée du point de vue de la santé. « Pour une infirmière, c’est une chance énorme de bénéficier d’un temps de détachement des soins pour pouvoir réfléchir à l’amélioration de nos pratiques ».